Avec « Le Temps du débat », sur France Culture, Emmanuel Laurentin donne à mieux entendre le monde

FRANCE CULTURE – À LA DEMANDE – PODCAST

C’était en 2019, et les auditeurs s’en souviennent. Emmanuel Laurentin annonçait la fin de « La Fabrique de l’histoire », l’émission qu’il avait créée vingt ans plus tôt – laissant habitués et historiens inconsolables. Heureusement, il ne disparaissait pas des grilles de France Culture et imaginait « Le Temps du débat », où, du lundi au vendredi, il fait dialoguer professeurs, sociologues et chercheurs sur un sujet d’actualité. Il fut récemment question d’agriculture, en résonance avec la contestation en cours, ou encore de politiques culturelles, alors que Rachida Dati arrivait Rue de Valois (siège du ministère de la culture).

Parmi les émissions consacrées à Israël et à la Palestine depuis le 7 octobre, signalons-en deux particulièrement intéressantes. L’une (en date du mardi 13 février) s’intéresse au clivage des opinions européennes sur la question palestinienne. Marie-Violaine Louvet (maîtresse de conférences en civilisation britannique et irlandaise à l’université Toulouse II-Jean Jaurès) rappelle le soutien de longue date de l’Irlande à la Palestine.

Elle souligne aussi les déclarations véhémentes à l’encontre d’Israël de Mary Lou McDonald (la présidente du Sinn Fein, parti nationaliste dont la vice-présidente, Michelle O’Neill, a été élue, samedi 3 février, première ministre), exhortant le gouvernement irlandais à se joindre à l’Afrique du Sud dans sa plainte du 29 décembre 2023, devant la Cour internationale de justice, accusant l’Etat hébreu de violer la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza.

Hubert Peres, chercheur au Centre d’études politiques de l’Europe latine et professeur de science politique à l’université de Montpellier, rappelle que la gauche radicale espagnole parle, elle aussi, de génocide et refuse de qualifier le Hamas d’organisation terroriste, alors que la plupart des pays occidentaux le reconnaissent comme tel et que l’un de ses buts affichés est d’éliminer Israël.

Antisémitisme toujours présent

« Y a-t-il une caractéristique de l’antisémitisme à gauche ? » était le titre de l’émission du mercredi 7 février. Pour Brigitte Stora, autrice de Que sont mes amis devenus… Les juifs, Charlie, puis tous les nôtres (Le Bord de l’eau, 2016), l’antisémitisme a toujours été là : « Je crois qu’il est quand même temps de l’écouter, puisqu’il dit exactement toujours la même chose. Il dit qu’il y a un peuple coupable qui conspire à la domination mondiale. »

Dans la voix de Lola Yaïche, étudiante, on entend la peur, la colère et la douleur. En tant que militante de gauche, elle s’est sentie « isolée » avec la désagréable impression que « la gauche passe plus de temps à penser l’instrumentalisation de l’antisémitisme que l’antisémitisme lui-même ».

Penser vraiment et donner à réfléchir comme à dialoguer, bref, élever le débat, voici ce que fait si bien Emmanuel Laurentin.