Le film d’Arnaud des Pallières est un huis-clos dans l’enfer des femmes, à la Salpêtrière, où l’internée volontaire jouée par Mélanie Thierry découvre l’horreur et le désespoir.
Le cinéma nous a déjà fait pénétrer dans l’univers carcéral de l’Hôpital de la Salpêtrière, avec « Augustine » d’Alice Winocour où Vincent Lindon incarnait le professeur Charcot, et « Le bal des folles », adaptation du roman de Victoria Mas par Mélanie Laurent. Il est à nouveau question de ce fameux bal, événement mondain où le Tout-Paris venait s’encanailler, dans le film d’Arnaud des Pallières, « Captives » (sortie le 24 janvier). Mais si l’on s’y affaire à sa préparation, ce n’est guère que dans la partie finale qu’on assiste à la soirée dansante, dernière du genre, en 1894.
Au Festival de Deauville, où le film était présenté en avant-première, le réalisateur était accompagné de quelques-unes de ses actrices, Mélanie Thierry, Carole Bouquet, Josiane Balasko, Dominique Frot… un sacré casting, complété à l’écran par Marina Foïs et Yolande Moreau. « La grande aventure de ce film a été la présence de toutes ces femmes, très différentes et pas toutes actrices, ça a été très émouvant pour nous tous, je pense qu’il se passe quelque chose de particulier », disait alors Arnaud des Pallières, évoquant ainsi ces figurantes, malades pour certaines.
« Captives » s’ouvre avec un gros plan sur les mains d’une femme entravée, une élégante, en manteau bleu et chapeau, humiliée dès son arrivée, soumise aussitôt à un traitement de choc (déshabillage, bain d’eau froide, verre de bromure…). C’est Fanni, jouée par Mélanie Thierry, qui va vite subir l’autoritarisme de la surveillante générale (Josiane Balasko), et surtout de la vraie méchante des lieux, une infirmière cruelle impeccablement interprétée par Marina Foïs, qu’on découvrira « folle parmi les folles ».
« Ici, aucune femme n’est folle »
En fait, c’est volontairement que Fanni s’est fait interner dans cet asile, sans prévenir personne, elle la bourgeoise qui a pourtant un mari, des enfants, une vie confortable, et qui a tout abandonné pour venir rechercher sa mère, disparue depuis trente ans et peut-être enfermée ici depuis tout ce temps. « Ici, aucune femme n’est folle », lâche Hersilie Rouy (jouée par Carole Bouquet), captive elle aussi mais qui bénéficie d’un traitement de faveur dû à son rang, et son état, grande bourgeoise enfermée par son frère depuis quatorze ans.
Dans cet enfer des femmes, où elle est désormais prise au piège, Fanni n’est qu’une parmi d’autres, pas toutes délinquantes, « hystériques » ou prostituées, mais indésirables pour une raison ou une autre, enfermées par l’abusive société des hommes. Elle découvre la violence, la misère, l’arbitraire, les mauvais traitements, la camisole de force, la brutalité, la douleur, l’injustice… mais aussi l’entraide et la solidarité féminine. Huis-clos éprouvant, fait d’horreur et de désespoir, « Captives » est un drame historique, forcément, sur ce que fut une certaine « condition féminine » avec tous ses malheurs.
Patrick TARDIT
« Captives », un film de Arnaud des Pallières, avec Mélanie Thierry, Carole Bouquet, Marina Foïs, Josiane Balasko, Yolande Moreau (sortie le 24 janvier).
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