L’AVIS DU « MONDE » – POURQUOI PAS
Pour préserver leur amour des mauvais effets de la routine et renouveler chaque fois le plaisir des retrouvailles, ils ont décidé, d’un commun accord, de vivre chacun de son côté. Lili (Emilie Dequenne), agente immobilière, sous-loue à son vieux père, Jacques (Michel Jonasz), un petit appartement qu’il a autrefois occupé avant de s’installer à la campagne avec sa femme. A quelques rues de là, Simon (Max Boublil), garagiste, occupe l’appartement situé au-dessus de son lieu de travail.
Leur fils, Abel (Arthur Roose), âgé d’une dizaine d’années, s’accommode quant à lui de la situation, qui va d’un foyer à l’autre sans sourciller. Et sait en jouer parfois, en choisissant ce qui lui convient. Maman, laxiste sur les horaires, les pizzas et les bonbons ; papa, soucieux de préparer des repas équilibrés et toujours prêt à lui montrer les voitures de collection dont on lui confie la réparation.
Ce petit arrangement avec les conventions fait circuler un air de légèreté qui donne rapidement le « la ». Pas d’ambiguïté quant à la nature de Double foyer. Ancienne critique de cinéma, autrice de plusieurs romans et réalisatrice, avec Christophe Beauvais, du court-métrage La Librairie de Schrödinger (2009), Claire Vassé n’a pas visé le film sociologique, mais plutôt choisi, pour son premier long-métrage, de nous chanter la ritournelle.
Quotidien primesautier
Nous sommes à Toulouse, la Ville rose baignée de lumière, où un couple s’aime comme deux inséparables (cadeau que Jacques, d’ailleurs, fait à son petit-fils) ayant opté pour deux nids différents, parce que « se retrouver ne doit pas être une obligation, mais une espérance ». Du regard des autres ils se moquent bien. Et même des mauvaises langues qui prétendent que ce schéma familial cache forcément quelque chose. Peut-être un goût pour le libertinage, allez savoir !
Le moins imperméable au qu’en-dira-t-on sera leur fils, qui commencera à se poser des questions, puis à les soumettre de plus en plus fréquemment à ses parents. Ces derniers aussi seront mis à rude épreuve, leur quotidien primesautier soudain bouleversé par la maladie, puis la mort, de Jacques. Et par le retour, un beau jour, après des années d’absence, de Julien (Pierre Rochefort), meilleur ami de Simon depuis leur enfance à la DDASS.
Ces événements auront pour effet d’ébranler dangereusement le mode de vie du couple, sans contrarier réellement l’unité de ton que contribuent, en grande partie, à préserver une réalisation assez sage, la bande-son et les chansons composées par Guillaume Aldebert, que fredonnent les acteurs tout au long du film. Dans ce climat de comédie romantique un brin pantouflarde – en totale contradiction avec le sujet –, Double foyer ne fait que survoler chaque élément qui le traverse, peine à créer du relief et à installer un réel enjeu. Au point d’apparaître, au bout du compte, fort anecdotique.
Il vous reste 3.43% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Source du contenu: www.lemonde.fr