Pour la première fois, le théâtre accueille la version française du Cercle des poètes disparus, le film culte de Peter Weir. Jubilatoire.
Trente-cinq ans après sa sortie au cinéma Le Cercle des poètes disparus s’agrandit. Où ? Au Théâtre Antoine. Avec, dans le rôle du professeur de lettres John Keating, Stéphane Freiss. Dans le film de Peter Weir (scénario oscarisé de Tom Schulman) ce personnage est incarné par Robin Williams. Autant dire un vrai pari pour Freiss.
En revoyant le film on comprend pourquoi le théâtre s’en est emparé. Il y a là un matériau déjà façonné pour les planches. Tout y est : lieu, action, temps, des répliques gravées dans le marbre, des caractères bien dessinés, une atmosphère, celle d’une bande de collégiens pensionnaires.
Tradition, honneur, discipline et excellence
Mise en scène par Olivier Solivérès, réputé pour ses spectacles pour la jeunesse, cette version ne se pousse pas du col et roule à tombeau ouvert. Les pupitres ne cessent de glisser d’un bout à l’autre de la scène, virevoltent comme des autos tamponneuses. Parfois, la salle de cours à l’imposant tableau noir se change en cette fameuse grotte, où une poignée de collégiens réfractaires se retrouve la nuit pour réciter des poèmes. Bien entendu, le spectateur attend Keating comme le messie. Et le voilà qui se lève – il était assis dans le public -, à l’appel du doyen de Welton, établissement dont la réputation repose sur quatre piliers : tradition, honneur, discipline, excellence.
Freiss séduit par sa décontraction. Il joue à merveille cet anticonformiste à qui ses ouailles rendront plus tard hommage
Immédiatement, Freiss, barbe de trois jours et cheveux en bataille, nous fait bonne impression ; d’emblée, il nous cueille. On sent qu’avec lui la discipline va en prendre un coup. D’ailleurs, dès son premier cours – celui où, debout sur son bureau, il lance à ses tendres cervelles juvéniles le fameux « O Capitaine ! Mon Capitaine ! » -, on oublierait presque Williams.
Dans la classe, les six élèves en uniforme (nous sommes en 1959) sont Tod le timide (Hélie Thonnat), Charlie le rebelle (Audran Cattin), Richard l’amoureux (Maxime Huriguen), Meekx l’enrobé sympa (Pierre Delage), Gary le timoré (Maxence Seva) et le pauvre Neil qui se rêve comédien bien que son tyran de père le voie médecin. Neil (touchant Ethan Oliel) est celui par qui le drame arrive. Ces jeunes acteurs sont attachants et leurs personnages profondément liés à leur maître à penser. À dépenser, plutôt. Car Freiss séduit par sa décontraction. Il joue à merveille cet anticonformiste à qui ses ouailles rendront plus tard hommage. Ils se souviendront de sa liberté d’être, de tout ce qu’il représenta de bon et de loyal ; il aura été celui qui leur a fait découvrir le vrai sens de la vie. Mais Freiss ne se contente pas d’envoûter sa classe, il enlace aussi le public. Pari gagné, donc.
Au Théâtre Antoine (Paris 10e). Tél. : 01 42 08 77 71. www.theatre-antoine.com
Source du contenu: www.lefigaro.fr