À l’opéra de Nancy, la mise en scène de l’Allemand Kevin Barz de La Création d’Haydn, bouleverse les codes de l’art lyrique et transporte le spectateur dans un monde très contemporain.
Un opéra aussi visible dans le métavers, des «metahumans» et même un robot sur scène: avec l’oratorio La Création de Joseph Haydn, exceptionnellement mis en scène, l’Opéra national de Lorraine bouleverse les codes de l’art lyrique et transporte le spectateur dans un monde très contemporain. L’imposante salle de l’opéra, basée à Nancy, est évidemment accessible aux spectateurs munis de billets… Mais pas que. D’autres peuvent la rejoindre sur leur ordinateur ou depuis un casque de réalité virtuelle pour assister à cette représentation peu commune.
En entrant virtuellement dans le bâtiment, le spectateur découvre différentes affiches de médiation, lui permettant de comprendre le spectacle qu’il va voir. Puis il prend place, toujours virtuellement, dans ce monde parallèle qu’est le métavers, dans la salle. La représentation, jouée et filmée en direct, est donc entièrement retransmise à distance… Et les spectateurs du métavers peuvent se «demander en ami» et interagir entre eux. Ils peuvent aussi se déplacer dans la salle, ou sauter du balcon…
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Sur place ou à distance, les spectateurs ne manqueront pas d’observer l’arrivée, en même temps que celle de l’humain dans l’origine du monde, de «metahumans», de part et d’autre de la scène: des visages de scientifiques connus diffusés à l’écran reprennent en direct les expressions des chanteurs de l’opéra, via un logiciel de reconnaissance faciale. On peut donc voir de faux visages issus de l’intelligence artificielle à l’écran, et croire que ce sont eux qui ont la voix de la soprano Julie Roset : La Création continue finalement, avec des humains 2.0.
Robot humanoïde
Un cheval ou une vache modélisés en 3D, le «metahuman» du physicien théoricien Albert Einstein… Le metteur en scène Kevin Barz a voulu, en s’inspirant de la genèse biblique du monde, l’associer à l’histoire scientifique et aux progrès et enjeux du XXIe siècle. Autre grande nouveauté, ou petite révolution dans le monde du spectacle vivant: avant le clap de fin, un robot humanoïde est transporté, avec soin, par quatre techniciens, sur la scène. Ameca, qui cligne des yeux comme un humain, bouge ses bras et ouvre la bouche de manière on ne peut plus naturelle, a fait ses débuts sur la scène d’un opéra, alors qu’il était jusqu’ici plutôt utilisé dans les coulisses de films de science-fiction.
Un partenariat scientifique et technologique a été conclu avec l’OFFIS (Institute for Information Technology, de l’Université d’Oldenburg, en Allemagne) pour la mise à disposition d’Ameca. Présent non pas simplement pour étonner le public, l’humanoïde est en parfaite harmonie avec les choix de Kevin Barz, qui interroge, dans le spectacle, l’évolution scientifique mais aussi la frontière entre humanité et digital. L’oratorio Die Schöpfung (La Création) a été créé au Burgtheater à Vienne, le 19 mars 1799. Les oratorios, ces musiques vocales à sujet religieux, ne sont habituellement pas adaptés à la scène.
Jeune public
Une autre raison pour laquelle cet opéra riche en couleurs et dont la scène est entièrement composée de murs vidéo LED a été créée de cette manière est la «préoccupation» du metteur en scène Kevin Barz au sujet du «scepticisme croissant dans le monde à l’égard des sciences», explique-t-il, cité dans un communiqué. Pédagogique, douce, l’adaptation de cet oratorio raconte, dans ses deux premiers actes, la création du monde, du chaos, au firmament, aux mers, aux plantes, aux humains. Ensuite, Adam et Eve chantent leur bonheur, mais doivent être mis en garde.
Pour l’Opéra national de Lorraine, l’enjeu de s’approprier ces nouvelles technologies est fort: le déploiement dans le métavers ou encore la rediffusion, dans le métavers et sur l’application de diffusion de vidéos en direct Twitch, avec deux «streamers», devraient aussi sensibiliser le jeune public à l’opéra. Les prochaines représentations, du 18 au 23 février (dimanche, mardi, jeudi et vendredi), sont ouvertes au public sur place mais aussi dans le métavers, avec possibilité de se connecter depuis un ordinateur ou un casque de réalité virtuelle. Les spectateurs pourront continuer à visionner ce jumeau digital dans le métavers jusqu’à la fin de la saison 2023-2024.
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