Alors que la fête de l’Aïd el-Kébir – qui commémore l’épreuve d’Abraham auquel, dans la tradition musulmane, Dieu avait demandé de sacrifier son fils Ismaël avant de le remplacer par un agneau – est prévue pour la mi-juin prochaine, les Tunisiens se demandent s’ils vont pouvoir se l’offrir cette année. Les prix s’envolent cette année encore. Ils peuvent atteindre les 1 500 dinars – soit environ 440 euros – soit trois fois plus que le SMIC (salaire minimum) actuel en Tunisie.
Un brin nostalgique, Amine Ouali, associé à son grand-frère, présente les rescapés de son élevage. « On a décidé de tout arrêter. On avait deux élevages de 250 brebis chacun, mais on a décidé d’arrêter parce que ce n’était plus intéressant, regrette-t-il. Une ferme sans animaux ça n’a pas de goût franchement, c’est un peu vide. »
En cause, le prix des fourrages – en partie importés comme le tourteau de soja – qui a explosé, explique-t-il. « Maintenant, je pense que la plupart des éleveurs sortent pâturer dehors. Ils n’arrivent plus à acheter. C’est trop cher. La botte de foin à 20 dinars, l’année dernière, elle est arrivée à 30 dinars, c’est énorme », décrit l’éleveur.
Trente dinars, soit près de neuf euros. De quoi grever la marge des éleveurs et les obliger, dit-il, à augmenter leurs prix. C’est ce que soutient Malek Rhaiem. Alors que le gouvernement réfléchit à importer des bêtes pour avoir plus d’animaux et donc faire baisser les prix, il accuse le coup. « C’est grave, on n’a pas su améliorer, sauvegarder notre race. Nous, on choisit toujours la facilité, déplore-t-il. Vraiment, ce n’est pas une politique d’avenir. Si on fait un business plan, on le fait à sept ans, dix ans. »
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Ne pas alourdir ses dettes
Le prix élevé des bêtes a poussé Lotfi Riahi, président d’une association de défense du consommateur tunisien, à devoir trancher. Faut-il oui ou non sacrifier une bête au vu des prix galopants ? L’association a été rencontrée des religieux dont le Mufti de la République et ils ont pris position. « La position de l’islam là-dessus est la suivante, rapporte-t-il. Le sacrifice ne doit être fait que par les personnes qui en ont les moyens. Il y a beaucoup de Tunisiens qui ne savent pas ça et qui s’endettent par exemple pour acheter leur mouton. »
Or, selon lui, ce n’est pas une solution. « En prenant un crédit pour acheter un mouton, le Tunisien va alourdir encore plus ses charges économiques. S’il n’a pas les moyens, il n’a pas à sacrifier de bête », assure-t-il. Un appel à la sagesse difficilement audible en Tunisie où l’achat d’un mouton – au-delà de la prescription religieuse – est aussi perçu comme un moment festif.
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