C’est l’un des grands dossiers de cette campagne : les Américains peinent à se loger. La faute à un déficit de 4 à 7 millions de logements sur le marché qui pousse les prix à la hausse. Une situation qui remonte à la crise des subprimes.
Avant 2008, plus de deux millions de logements sortaient de terre chaque année aux États-Unis. Le marché immobilier était florissant, porté par les banques qui prêtaient à tout le monde, y compris à des ménages non solvables, des prêts risqués réunis en « paquets » : les fameux subprimes. Quand la réalité a fini par rattraper les apprentis sorciers du prêt hypothécaire, tout le système financier était contaminé. La crise culmine le 15 septembre 2008 quand la banque Lehman Brothers fait faillite. Après avoir fait un exemple, très vite l’État fédéral se porte au secours des autres institutions financières en difficulté pour éviter la contamination. De nombreux promoteurs immobiliers, eux, mettent la clé sous la porte. Les plus gros survivent en réduisant sérieusement la voilure. Au pire de la crise, la production annuelle de logement tombe à moins de 600 000.
Les États-Unis passent d’une surproduction à une sous-production chronique qui va durer quinze ans. Quinze années pendant lesquelles la société évolue : les études se rallongent, les couples s’installent et font des enfants plus tard dans leur vie, divorcent plus vite. Les Américains en 2024 vivent donc plus souvent seuls que ceux de 2008. Entre 2012 et 2022, le nombre d’Américains vivant seuls a augmenté de 5 millions. Ajoutez à cela la croissance démographique, l’immigration, et vous obtenez un déficit de logements que les experts estiment à près de 4 millions, et jusqu’à 7 millions pour les plus pessimistes. Résultat : les prix s’envolent – même en dehors des grandes villes – et les Américains peinent à se loger.
Donald Trump mise sur la lutte contre l’immigration et la dérégulation
Face à ce constat, Donald Trump propose les mêmes solutions que pour à peu près tous les autres problèmes. « Ces trois dernières années, moins de 5 millions de logements ont été construits aux États-Unis », a souligné le candidat Républicain en meeting en Arizona. « Dans le même temps, Kamala Harris a fait entrer 21 millions de migrants illégaux sur le territoire, des migrants qui occupent de manière disproportionnée les logements à faible loyer ». Donald Trump qui veut mener « la plus grande expulsion de l’Histoire » estime donc que cela règlerait en partie le problème. Les experts soulignent que les migrants constituent aussi « de manière disproportionnée » la main-d’œuvre sur les chantiers du bâtiment, ce qui risquerait d’aggraver le problème. L’ex-président veut aussi déréguler le secteur de l’immobilier pour encourager l’investissement privé. Kamala Harris de son côté préfère miser sur les incitations fiscales, en facilitant l’accès aux prêts des primo-acheteurs et en créant un crédit d’impôt à destination des promoteurs avec pour objectif de construire « trois millions de nouveaux logements » « d’ici la fin de [son] premier mandat ».
La crise du logement à mettre en perspective avec la crise des immeubles de bureaux. « Aux États-Unis, 20 % des immeubles de bureaux sont vides, personne ne les loue. Et il faut y ajouter 20 % supplémentaires de bureaux qui sont loués… mais où personne ne se rend », soulignait récemment Stephen Schwarzman, le patron du fonds d’investissement Blackstone. Un phénomène accentué par le recours croissant au télétravail. « Ça fait 40 % de bureaux inutilisés. Que se passera-t-il à la fin du bail ? Les entreprises vont réduire l’espace qu’elles occupent. Donc sur le plan économique, ces immeubles ne sont pas viables ». Des bâtiments vides, d’un côté, des dizaines de milliers de personnes en recherche de logements de l’autre, une équation qui mériterait peut-être d’être résolue.
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