L’économie des territoires palestiniens, déjà brisée par la guerre, est désormais menacée d’une quasi-asphyxie financière. Le ministre israélien des Finances, un ultranationaliste, dit vouloir bloquer les transferts d’argent entre l’État hébreu et l’administration palestinienne.
Une menace brandie lorsque l’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé leur intention de reconnaitre l’État palestinien. Une intention qui s’est matérialisée mardi. Le ministre des Finances Bezalel Smotrich est membre d’un parti d’extrême droite devenu indispensable au maintien au pouvoir de Benyamin Netanyahu. Ce qui donne une grande marge d’action à ce dur du gouvernement, partisan de l’annexion de la Cisjordanie et de la destruction de Gaza. Depuis l’attaque du 7 octobre, il multiplie les gestes punitifs à l’égard de l’Autorité palestinienne qu’il accuse de financer le Hamas. Il dispose pour cela de puissants leviers.
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Les recettes fiscales des Palestiniens contrôlées par Israël
Depuis les accords de Paris signés en 1994 par l’OLP, son ministère prélève les taxes sur les importations palestiniennes transitant par Israël et il transfère ensuite le produit de la collecte. C’est la principale source de recettes de l’administration de Ramallah. Le ministre a par ailleurs le pouvoir d’autoriser ou pas des banques israéliennes à effectuer des transactions en shekel pour le compte des Palestiniens. Ces procédures exceptionnelles devaient expirer avec les accords d’Oslo, mais faute de percée dans les négociations, elles sont encore en vigueur, d’une utilité vitale pour les territoires. Et le ministre israélien des Finances veut donc suspendre les deux dispositifs.
Une menace déjà mise à exécution
Il a déjà interrompu le versement des taxes après l’attaque du 7 octobre. En conséquence, les fonctionnaires palestiniens n’ont pas été payés pendant plusieurs mois, faute de cash dans les caisses de l’autorité palestinienne. Il a fallu l’intervention d’un tiers indépendant, la Norvège, pour que le versement soit enfin réactivé en février via un fonds basé dans ce pays. Avec la reconnaissance de l’État palestinien par Oslo, ce canal pourrait à nouveau être refermé. La Norvège n’est plus un partenaire neutre, estime le trublion de l’extrême droite.
Suspense sur l’autorisation accordée aux banques israéliennes
Pour sanctionner l’administration palestinienne, il veut aussi révoquer l’habilitation accordée chaque année en juillet aux banques israéliennes. Cette décision entraînerait des conséquences catastrophiques dans les territoires. C’est via les banques israéliennes que l’Autorité règle l’eau, l’électricité, les produits agricoles en provenance de l’État hébreu. Des commodités de première nécessité pour les habitants de la Cisjordanie. Ces liens financiers entre Palestiniens et Israéliens portent sur des montants importants. La facture des importations palestiniennes via Israël se monte à 8 milliards de dollars et ses exportations à 2 milliards de dollars.
Les pressions américaines sur Israël
Les États-Unis ont mis en garde le gouvernement Netanyahu sur les effets dévastateurs d’une telle décision. Jack Sullivan le conseiller à la sécurité de Joe Biden, puis Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, ont tous les deux rappelé que maintenir à flot ce qu’il restait de l’économie palestinienne était le meilleur rempart contre les débordements de la rue palestinienne. Et de rappeler tous les deux que contrairement aux affirmations du ministre, l’Autorité palestinienne ne détourne aucun fonds au profit du Hamas. On verra dans les prochains jours si les pressions américaines suffisent à faire reculer l’un des ministres les plus virulents du gouvernement Netanyahu.
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