À l’heure des négociations commerciales pour fixer les prix de la banane en 2024 dans les grandes surfaces européennes, les producteurs d’Amérique latine dénoncent le double discours de certains distributeurs qui refusent de payer plus malgré leur soutien affiché à une production durable. Une illustration des défis auxquels doit répondre la filière toute entière et qui concernent aussi bien la banane d’Équateur, de Martinique que de Côte d’Ivoire.
Dans plusieurs pays européens, c’est ce vendredi 22 novembre que sont discutés les prix de la banane qui seront en vigueur en 2025 dans les supermarchés. Un bras de fer annuel particulièrement difficile, car on parle du fruit qui sert de produit d’appel dans la grande distribution, celui qui fait venir les consommateurs. Toucher à son étiquette est presque tabou.
En face, on demande toujours plus à la banane pour qu’elle diminue son empreinte carbone et qu’elle utilise moins d’intrants de synthèse. Les attentes environnementales et sociétales se sont multipliées ces quinze dernières années. « Des exigences qui ne sont aujourd’hui plus vraiment optionnelles », relève un expert de la filière, mais qui sont de moins en moins compatibles avec les prix offerts au producteur. C’est précisément ce que dénoncent cette semaine les pays d’Amérique latine qui représentent environ 60 % du marché — Colombie, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Pérou et République dominicaine.
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Une responsabilité partagée
Dans un texte commun, les producteurs de ce qu’on appelle la banane dollar pointent du doigt les détaillants qui imposent des obligations aux fournisseurs sans vouloir prendre leur part de responsabilité. Les grands discours sur la durabilité ne sont en fait que « des déclarations creuses », écrivent-ils. Dans leur viseur en particulier le distributeur allemand Edeka qui aurait clairement fait part de son intention de négocier les prix à la baisse.
De l’avis des experts de la filière, le débat n’est plus de savoir si l’action doit être collective, c’est devenu une nécessité. Dans une déclaration de presse ce jeudi 21 novembre, l’Association interprofessionnelle de la banane (AIB) — qui représente, en France, tous les maillons de la filière, du producteur au distributeur en passant par le grossiste et le mûrisseur — confirme la nécessité d’une responsabilité partagée : aux attentes en matière de durabilité s’ajoutent des risques agricoles et logistiques de plus en plus importants, relève l’AIB, des risques qui entraînent une addition de coûts.
Un cadre qui se durcit
À titre d’exemple, la météo affecte la production de bananes, en Afrique comme en Amérique latine, mais aussi le niveau d’eau du canal de Panama utilisé pour l’expédition des bananes d’Équateur, premier fournisseur de l’Europe. Les tensions sur le canal de Suez pèsent sur la disponibilité mondiale des conteneurs, alors que la guerre en Ukraine a fait grimper les prix des intrants, qui ne sont pas tous revenus au prix d’avant-guerre.
Ces contraintes commencent à « faire mal » à la filière et sont de moins en moins supportables pour les producteurs des 20 millions de bananes exportées chaque année dans le monde — sur une production mondiale de 80 millions.
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