Employés « fictifs » ou bourreaux de travail ? Ces maires cumulards qui restent hauts fonctionnaires

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Pierre Fond est un homme très occupé. Ce baron du parti Les Républicains dans les Yvelines cumule ses nombreux mandats – maire de Sartrouville (50 000 habitants), président de la communauté d’agglomération de Saint-Germain Boucle de Seine, premier vice-président du conseil départemental – avec un emploi à temps plein de haut fonctionnaire. Depuis 2017, il est l’agent comptable de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales (Onera) et du Centre national d’études spatiales (CNES), deux établissements publics spécialisés dans le domaine aérospatial sous tutelle de Bercy, dont les budgets cumulés dépassent les 3 milliards d’euros.

La situation de Pierre Fond, pointée en 2020 par le journaliste Vincent Jauvert dans le livre Les Voraces (Robert Laffont), fait grincer des dents en interne depuis déjà plusieurs années. Alors que l’élu francilien perçoit chaque année, grâce à ces fonctions, une rémunération de 215 000 euros en plus de ses indemnités d’élu, de nombreuses sources contactées au sein des agences comptables de l’Onera et du CNES confient que « ses équipes ne le voient jamais ». Selon elles, le travail qui devrait incomber à M. Fond serait, dans les faits, accompli par deux fondés de pouvoirs, qui agissent à la place de l’agent comptable. « On a un agent comptable qui est un nom et un titre, pas vraiment une personne effective », glisse, désabusé, un représentant syndical. « Il n’est dans les locaux que pour les conseils d’administration », confirme un second.

Dès 2019, les syndicats de l’Onera déploraient, dans un tract, « une absence totale d’orientation et de soutien de la part de l’agent comptable, pourtant responsable hiérarchique de l’agence, peu présent » dans l’établissement. Un absentéisme répété souligné de nouveau dans un procès-verbal du comité central d’entreprise de juin 2023, dont Le Monde a eu connaissance. « Vous me l’apprenez », répond Jean Léger, le secrétaire général de l’Onera aux délégués du personnel. Interrogées, les directions du CNES et de l’Onera affirment, à l’unisson, que Pierre Fond remplit « parfaitement ses fonctions ».

Un cumul légal, mais qui questionne

Le maire de Sartrouville, qui n’a pas répondu aux sollicitations du Monde, n’est pas le seul élu concerné par un tel cumul, même si ces situations restent rares.

Grâce aux déclarations consignées par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), Le Monde a dénombré une dizaine de maires de moyennes et de grandes villes toujours employés dans la haute fonction publique, rémunérés par Bercy, le Conseil d’Etat ou encore la Cour des comptes. En cumulant salaires et indemnités d’élus, ils perçoivent des revenus très confortables, oscillant entre 80 000 et 291 000 euros net par an.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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