Après le violent incendie d’un entrepôt de batteries au lithium dans l’Aveyron ce samedi 17 février, le débat sur le stockage et la dangerosité des fumées dégagées sont pointés du doigt par certains professionnels et des associations.
Le petit village de Viviez en est encore secoué. Dans l’après-midi du samedi 17 février, de violentes explosions sont venues troubler la quiétude de cette localité de l’Aveyron. Puis un large panache de fumée noire a inquiété le millier de riverains habitant autour de l’usine de la Société nouvelle d’affinage des métaux (Snam). Dans son entrepôt, 900 tonnes de batteries au lithium sont parties en fumée.
Stable à une basse température, cette technologie peut prendre feu si le mercure s’affole. «La température idéale de fonctionnement est au alentour de 20 ou 30 degrés Celsius, détaille Ivan Lucas, enseignant-chercheur à l’Institut des matériaux de Nantes. Au-delà de 70°C, il peut y avoir un risque d’emballement thermique.» Une fois cette réaction enclenchée, quelques minutes suffisent pour que la batterie brûle et explose.
Une multiplication des incendies
En décembre 2023, c’étaient deux containers, remplis de batteries à base de lithium, qui avaient pris feu dans une usine du Puy-de-Dôme. En novembre dernier, les pompiers de la Réunion luttaient contre un incendie au Port Ouest lors duquel 200 batteries étaient parties en cendre. D’après une étude publiée en 2020, les batteries au lithium sont responsables d’une augmentation des incendies de 25 % dans les centres britanniques et américains qui gèrent la collecte et tri des batteries usagées et des déchets d’équipements électriques et électroniques.
Face à la multiplication de ces faits divers, les professionnels alertent les autorités. «Il n’y a absolument aucune législation sur le stockage de ces batteries», déplore Jean-Claude Solanny, responsable de la formation pour Denios, une entreprise spécialisée dans le stockage de produit dangereux. Si le groupe propose des armoires ou des conteneurs pouvant contenir les incendies, leur présence n’est pas obligatoire dans des entrepôts de stockage. «Il y a des directives européennes qui détaillent qu’il ne faut pas entrechoquer les batteries, les surcharger ou les mettre au soleil, développe le professionnel. Mais finalement, chacun fait comme il veut.» Lui plaide pour une législation sur ce stockage. D’autant plus que ces incendies peuvent libérer des substances nocives pour l’homme ou l’environnement.
Des substances nocives dans l’atmosphère
Ce samedi 17 février, les habitants de Viviez ont été contraints de se confiner. Dans la soirée, la préfecture a levé l’arrêté en considérant que les mesures effectuées par les marins-pompiers de Marseille sur site et autour du site, «s’agissant des substances émises dans les fumées ont permis d’écarter tout risque pour les populations». Une communication qui a fait tousser certaines associations. Dans un communiqué diffusé ce lundi 13 février, l’association Robin des Bois, qui alerte notamment sur les problèmes d’écologie et de pollution, a fait part de sa «stupéfaction» face à la décision de la préfecture pointant du doigt les risques sur les populations et l’environnement. «Ce qui est arrivé est très grave», a de son côté dénoncé l’association locale de défense de l’environnement Adeba sur sa page Facebook, assurant ne pas se contenter «de communiqués rassurants de la préfecture, de l’entreprise et des élus locaux».
Les batteries au lithium, qui servent aujourd’hui dans les véhicules, les vélos ou les trottinettes électriques sont composées en partie de liquide électrolytique, un composé hautement inflammable qui fait office de conducteur d’énergie entre les différentes piles. «Ce sel conducteur contient du lithium, du fluor, et phosphate, énumère Ivan Lucas. En se consumant, ce sel peut libérer de l’acide fluorhydrique qui peut présenter une forte toxicité.» Cet élément peut représenter des «risques aigus» pour la santé et même «un danger mortel» selon le site du Ministère du travail, de la santé et des solidarités. «Si l’on fait un rapide calcul, à Viviez dans l’Aveyron, ce serait 10 tonnes de cet élément qui se seraient envolées dans l’atmosphère», ajoute le chercheur.
«Les batteries au lithium contiennent aussi du nickel, du manganèse, du cobalt et du plastique dont la co-combustion a dégagé des poussières et des suies toxiques», complète l’association Robin des Bois dans son communiqué et appelle l’Union européenne et la France à informer «officiellement les usagers et les populations riveraines de tous les risques liés à l’usage, au recyclage et à la production des batteries au lithium.»
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