Les militants de la Coordination rurale de Lot-et-Garonne (CR 47) ont débloqué le port de commerce de Bordeaux comme prévu, vendredi 22 novembre au matin, pour rentrer à Agen, où le déplacement du président du syndical rival de la FNSEA, Arnaud Rousseau, a été perturbé.
La venue de M. Rousseau pour le congrès national des producteurs de légumes s’est heurtée à un accueil hostile de la part de la CR 47 : une cinquantaine de militants se sont rassemblés à la mi-journée face à des CRS postés devant les grilles du parc des expositions, où se trouvait le préfet du département. Dans une atmosphère électrique, ils ont hué le patron de la FNSEA, syndicat agricole majoritaire au niveau national, le laissant rejoindre son véhicule sous escorte policière.
« Vous ne l’empêchez pas de sortir mais qu’il voie bien qu’en Lot-en-Garonne on est chez nous », a lancé à ses troupes Serge Bousquet-Cassagne, président de la chambre d’agriculture du département et cofondateur de la section départementale de la Coordination rurale (CR). « Les gars, on peut discuter mais pas comme ça », a réagi Arnaud Rousseau avant de s’engouffrer dans sa voiture, qui a démarré en trombe. Des militants ont essayé de bloquer sa sortie du parking en déplaçant des chariots de supermarché et des tracteurs. Plusieurs entrées de la zone commerciale avaient été barrées par des feux de déchets, du lisier et des détritus.
Le président de la FNSEA a dénoncé les « méthodes lamentables » et les « menaces pas acceptables » des représentants de la CR qui ont perturbé son déplacement. « Je rappelle que la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs sont majoritaires dans 95 % des chambres [d’agriculture] et que, pour ma part, jamais je n’accepterai que la présidente de la Coordination rurale ne puisse pas aller dans un département, qu’elle soit menacée physiquement », a déclaré Arnaud Rousseau.
Jeudi soir dans un communiqué, la FDSEA 47 avait accusé la CR, textos à l’appui, de vouloir perturber l’événement. « On n’est pas là pour se battre entre agriculteurs », a déclaré vendredi matin à l’Agence France-Presse Jean-Pierre Labeau, céréalier et délégué de la CR 47. « Monsieur Rousseau, on a des choses à lui dire, mais on [les] lui dira ailleurs, ce n’est peut-être pas le lieu. » « Une action est susceptible de gêner l’accès au congrès national des légumes », a sobrement signalé la préfecture de Lot-et-Garonne dans un communiqué.
Serge Bousquet-Cassagne réclamait de son côté un entretien avec le patron de la FNSEA, que ce dernier a refusé. « Si [Arnaud] Rousseau parle, c’est avec Véronique Le Floc’h [présidente nationale de la CR], c’est tout », s’est justifiée la FDSEA 47. « Il a pris peur, alors que notre intention n’était absolument pas de le garder en otage », a répondu Serge Bousquet-Cassagne. « Tant pis. Les paysans de France (…) auront compris qui les défend et qui ne les défend pas. »
Revendications concernant la « surtransposition »
José Pérez, coprésident de la CR 47, avait annoncé jeudi soir la levée du blocage du port de commerce de Bordeaux, expliquant que le premier ministre avait répondu aux revendications concernant la « surtransposition » des règles imposées par l’Union européenne (UE), qui pénaliserait certaines filières agricoles.
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Interrogé par l’Agence France-Presse sur le fait de savoir si le gouvernement était prêt à autoriser à nouveau l’acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes (insecticides neurotoxiques), ou d’autres produits phytosanitaires réclamés par les producteurs, Matignon a répondu mercredi : « Le sujet pesticides est en cours d’arbitrage. »
« Il a dit que les agriculteurs avaient raison et qu’il allait regarder, surtransposition par surtransposition », a répété M. Pérez vendredi matin. « On s’était engagé, s’il faisait ça, à quitter les lieux, et de toute façon ce matin on aurait été délogés par la force, le préfet de région nous l’a dit hier. On ne veut pas leur donner cet honneur, donc on va partir la tête haute », a-t-il ajouté.
Le blocage du port bordelais, septième du pays pour le trafic de marchandises, entamé mercredi soir, était la dernière action d’envergure menée cette semaine. La CR 47 a voulu dénoncer l’importation de céréales étrangères, soumises à des normes différentes de celles en vigueur en France. Mais les autorités portuaires ont fait part de leur « incompréhension », affirmant que « Bordeaux est un port d’export céréalier au service de la filière agricole régionale » et qu’il « n’importe pas de céréales ».
Vendredi matin, la Coordination rurale des Landes a débloqué également une centrale d’achat Leclerc à Mont-de-Marsan après « un accord avec la préfète », selon son président, Vincent Coco. Deux autres plateformes de la grande distribution restaient bloquées vendredi en Charente et, dans l’après-midi, des agriculteurs ont pris position devant une base logistique du géant de la grande distribution Carrefour à Colomiers, près de Toulouse.
Selon les autorités, 335 agriculteurs avec 186 engins agricoles étaient mobilisés à la mi-journée dans sept départements, principalement dans le Sud-Ouest et le Sud. Les prochaines manifestations, à l’appel de la FNSEA, doivent avoir lieu mardi, mercredi et jeudi prochains.
Les agriculteurs réclament, entre autres revendications, des garanties d’amélioration de leurs revenus et le rejet d’un projet d’accord avec des pays latino-américains du Mercosur. Vendredi, la Pologne a exprimé son rejet de cet accord, à l’occasion d’une visite de la ministre de l’agriculture française, Annie Genevard. Paris tente de rallier d’autres pays pour bâtir une minorité de blocage à l’accord au sein de l’UE.
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