L’OMC en crise après l’échec des négociations sur l’agriculture et la pêche

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Malgré des discussions prolongées d’une journée, les ministres représentant les 164 membres de l’Organisation mondiale du commerce, réunis à Abu Dhabi, se sont quittés ce vendredi 1er mars sur un aveu d’échec. Deux dossiers en particulier, la pêche et l’agriculture, ont révélé les divisions profondes entre les pays membres.

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La réunion ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce s’est soldée vendredi 1er mars par un constat d’échec sur les dossiers majeurs de la pêche et de l’agriculture et un sauvetage en demi-teinte du moratoire électronique, plongeant l’organisation dans l’inconnu. 

Les résultats de la ministérielle ont mis en évidence les profondes divisions entre les 164 membres de l’OMC, « dans un contexte international marqué par une incertitude plus grande que jamais », a relevé Ngozi Okonjo-Iweala, la directrice de l’OMC, pointant du doigt les tensions géopolitiques, les inquiétudes économiques et les élections dans de nombreux pays. Les accords sont aussi difficiles à trouver car les décisions sont prises par consensus. « La beauté de l’OMC réside dans le fait que chaque membre dispose d’une voix égale, mais cela a aussi un coût », a-t-elle souligné.

La seule avancée de ces cinq jours de négociations concerne le commerce électronique, exempté de droits de douane depuis 1998. L’Inde a accepté in extremis de ne pas apposer son veto à l’extension du moratoire douanier sur les transmissions électroniques, mais pour deux ans au maximum, soit jusqu’en 2026. Le ministre du Commerce indien, Piyush Goyal, a expliqué que son pays avait décidé de lever son objection « par respect » pour Thani al-Zeyoudi, le président de cette conférence, le qualifiant de « bon ami ».

Des négociations qui ont capoté

C’est une goutte d’eau dans le verre du multilatéralisme, que même en étant très optimiste, on peinerait à qualifier d’à moitié plein. L’objectif à Abu Dhabi était d’établir de nouvelles règles sur les subventions à la pêche pour éviter la surpêche et les menaces qu’elle fait peser sur les populations marines. Les débats ont porté sur la flexibilité accordée aux pays en voie de développement, et se sont heurtés aux demandes jugées trop grandes de l’Inde.

Les négociations ont capoté sur l’agriculture et notamment la question des stocks de denrées alimentaires. Alors que l’Europe et l’Inde sont traversés par les manifestations d’agriculteurs, le sujet était décidément trop sensible. « L’agriculture est une fois de plus le sujet qui fait ou défait une conférence ministérielle », avait prévenu le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski sur le réseau X. Les négociations agricoles ont buté sur les revendications agricoles de l’Inde, acteur incontournable des négociations à chaque ministérielle.


Sur la pêche, les pays ne sont notamment pas parvenus à se mettre d’accord sur la période de transition accordée aux pays en développement, les pays estimant que l’Inde demandait un trop grand nombre d’années. « Plusieurs États ont exprimé des positions radicales en faveur de leurs seuls intérêts et n’ont pas permis d’avancer vers un compromis satisfaisant », a réagi le ministre français de la Transition écologique, Christophe Béchu, dans un communiqué.

Une institution affaiblie

Ce nouvel échec, alors que le mécanisme censé permettre le règlement des différends entre pays membres est lui-même bloqué depuis 2019 par les États-Unis, affaiblit encore un peu plus une institution qui fonctionne par consensus. « Peut-être que l’OMC avait besoin d’une bonne crise et peut-être que celle-ci nous fera prendre conscience que nous ne pouvons pas continuer ainsi », a affirmé une haute responsable européenne, qui craint que le commerce soit « de plus en plus caractérisé par des relations de pouvoir ». « Même si le commerce électronique est sauvé, on peut parler de crise à l’OMC », a renchéri une source proche des discussions.

« Si l’on peut parler de crise, c’est que le consensus, qui a été le ciment de cette organisation, est devenue la boue dans laquelle elle s’enlise », a réagi Richard Ouellet, de l’Université Laval au Canada, présent à Abou Dhabi. Pour John Denton, secrétaire général de la Chambre de commerce internationale, « la faiblesse inattendue du paquet global de résultats devrait cependant servir de signal d’alarme ». Comme à chaque ministérielle, la pression était forte pour que l’OMC affiche des résultats. Cette année les attentes étaient particulièrement élevées face au possible retour à la Maison-Blanche de Donald Trump, qui a tout fait pour torpiller l’organisation durant son premier mandat.

La précédente réunion en 2022 à Genève s’était achevée par un certain succès, avec des accords sur l’interdiction des subventions à la pêche illégale et sur les brevets des vaccins anti-Covid. Un « miracle » que Ngozi Okonjo-Iweala avait appelé à reproduire. Alors que son mandat s’achève l’an prochain, reste à savoir si elle sera encore présente à la prochaine ministérielle qui doit se tenir au Cameroun à une date encore indéterminée.


Source du contenu: www.rfi.fr

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