Pour qui suit de près les négociations de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur, une énième annonce de sa finalisation imminente pourrait prêter à sourire. Mais cette fois-ci, tout porte à croire qu’une signature est vraiment en vue. Elle pourrait avoir lieu dès la réunion du G20 organisée les 18 et 19 novembre à Rio de Janeiro, au Brésil. Et cela devrait faire les gros titres de tous les journaux.
Alors qu’en début d’année Emmanuel Macron jurait ses grands dieux que les négociations avaient été stoppées, il s’avère que non seulement celles-ci n’ont jamais été mises à l’arrêt, mais qu’elles n’ont jamais été aussi proches d’aboutir. Et pour cause : affaibli sur la scène européenne par la situation politique française et le marasme budgétaire qu’il a lui-même créé, le chef de l’Etat est désormais peu enclin à hausser le ton et semble sur le point
de capituler.
Aux dernières nouvelles, la Commission européenne tente même d’acheter le soutien de Paris avec un fonds de compensation agricole dont on sait pour l’heure peu de choses. Si ce n’est qu’il vaut reconnaissance implicite que cet accord est néfaste pour les agriculteurs, alors que ses promoteurs s’étaient jusqu’à ce jour évertués à nier en bloc le moindre impact !
Mais les faits sont têtus : comment peut-on prétendre que le fait d’importer chaque année, entre autres, 99 000 tonnes de bœuf, 180 000 tonnes de volaille, 25 000 tonnes de porc, 35 000 tonnes de fromage et 45 000 tonnes de miel supplémentaires à bas prix depuis les gigantesques fermes usines du Brésil ou d’Argentine ne va pas exercer une concurrence déloyale sur les agriculteurs européens ? Ces mêmes agriculteurs qui continuent de crier depuis des mois l’impossibilité de vivre de leur métier et qu’on a couverts de belles promesses. Déjà envolées, visiblement.
Catastrophe environnementale
Autre problème majeur : même si les normes européennes sont loin d’être suffisamment ambitieuses, les pays du Mercosur ne sont pas tenus de respecter les mêmes obligations, que ce soit en matière d’OGM, de conditions d’élevage ou encore de pesticides. A titre d’exemple, près d’un tiers des pesticides autorisés au Brésil sont interdits d’utilisation sur le sol européen. Qu’à cela ne tienne : signons un accord de libre-échange pour stimuler les importations des denrées alimentaires produites à l’aide de ces pesticides interdits, et remplissons-en nos assiettes !
Et comme à l’accoutumée, ce sont les multinationales qui vont rafler la mise. Au Brésil par exemple (le deuxième producteur mondial de bœuf), le marché de l’exportation de viande est contrôlé par une poignée de multinationales comme JBS, qui abat chaque jour plus de 70 000 bovins et a fait 73 milliards de dollars (67 milliards d’euros) de chiffre d’affaires en 2023.
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