Les crises sont propices aux dérives, et celle qui touche la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai ne semble pas y faire exception. C’est du moins ce que laissait entendre un communiqué de l’Autorité de la concurrence, diffusé au début du mois d’août, annonçant une enquête pour une suspicion d’entente entre opérateurs visant à former des monopoles d’importation.
« Nous sommes particulièrement vigilants à ce que la recomposition du tissu économique puisse bénéficier à tous les Néo-Calédoniens et ne constitue pas des opportunités, pour quelques-uns, de grossir davantage, explique au Monde Sophie Charlot, la rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence. On sait qu’en temps de crise il faut éviter que l’économie ne se réorganise autour de monopoles ou de positions trop fortes sur les marchés. Cela se fait au détriment des consommateurs. »
C’est dans ce cadre que s’inscrit l’investigation de l’Autorité et dans un contexte de forte paupérisation, avec un chômage qui touche près d’un employé sur quatre et des collectivités désormais incapables de financer un grand nombre d’aides sociales, en raison de recettes fiscales insuffisantes.
« Cette affaire est un non-sujet », s’agace auprès du Monde un acteur de la production locale néo-calédonienne, égratignant au passage l’Autorité de la concurrence et sa « surcommunication ». « Tout est parti d’une réunion à l’initiative du gouvernement, avec tous les acteurs. La question était de voir quels dispositifs pouvaient être mis en place pour accompagner les entreprises industrielles qui ont été brûlées », détaille-t-il.
Manque de transparence
De là est venue l’idée d’attribuer des quotas d’importation aux producteurs locaux pour leur permettre de substituer des produits d’importation à leur production. Une idée qui a logiquement fait bondir le Syndicat des importateurs et distributeurs (SID), dont Sylvie Jouault est la déléguée générale.
« Il y a des commerçants qui, faute de marchandises et de consommateurs, commencent à mettre leurs salariés en chômage partiel. Il n’y a pas plus de raisons de favoriser l’industrie locale que les commerces. Ce que l’on souhaite, c’est un bon approvisionnement du marché. On veut surtout éviter des émeutes de la faim dans les mois à venir parce que les gens n’arrivent plus à se nourrir décemment », souligne-t-elle.
Le SID dénonce le manque de transparence autour de ce projet, qui créerait de fait des cartels bénéficiant d’« avantages supplémentaires », et s’inquiète de la volonté du gouvernement de passer par la voie législative. Une obligation, puisque, dans l’état actuel de la réglementation, l’attribution de ces quotas d’importation serait illégale.
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