Aujourd’hui s’ouvre la COP29, la grande conférence onusienne sur le climat. Elle se tient à Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan. En amont de l’évènement, les ONG internationales de défense des droits humains et les rapporteurs spéciaux de l’ONU ont multiplié les mises en garde et réclament la fin de la répression contre les défenseurs de l’environnement et du climat. Car si la société civile ne peut pas se faire entendre, les négociations climatiques risquent de se vider de leur sens.
L’Azerbaïdjan est un pays autoritaire qui bafoue sciemment non seulement le droit international, mais aussi les droits de l’homme. Un exemple: Anar Mammadli, grand militant du climat, est emprisonné depuis fin avril. Et le gouvernement a forcé son organisation Climate for Justice Initiative de fermer. Mais Anar Mammadli est loin d’être le seul Azerbaïdjanais à être réduit au silence au fin fond d’une cellule.
« En amont de la COP29, il y a eu beaucoup d’arrestations de défenseurs du climat. Des journalistes et des universitaires ont été également ciblés », constate Mary Lawlor, rapporteuse spéciale de l’ONU sur les défenseurs des droits de l’homme. « Pour l’Azerbaïdjan, la COP sert de prétexte pour étendre encore davantage la répression. Alors que le pays réprime déjà toute forme de critique contre la politique du gouvernement ». Les ONG comme Amnesty International, Human Rights Watch et la FIDH ont appelé le régime azerbaïdjanais à libérer ces prisonniers. En vain.
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Les défenseurs de l’environnement et du climat pas seulement menacés dans des pays autoritaires
Dans les démocraties aussi, les défenseurs de l’environnement et du climat sont de plus en plus victimes de répression policière. Leurs actions sont criminalisées. De grandes multinationales, notamment du secteur des énergies fossiles, les trainent en justice. Dans certains pays d’Amérique latine leurs familles sont menacées. L’an dernier, près de 300 défenseurs de l’environnement ont été assassinés à travers le monde, 2 100 depuis la signature de l’accord de Paris, selon Climate Action Network. Et ce, alors que disposer d’un environnement sain est un droit humain et que le fait de le défendre est garanti par le droit international, au sein même des COP de l’ONU, ce droit est de moins en moins garanti.
Au sein des COP, l’espace pour les défenseurs du climat n’est ni sécurisé ni même garanti
« On voit que le processus se dégrade », s’inquiète Michel Forst, rapporteur spécial sur les défenseurs de l’environnement. « Charm el-Cheikh, en Égypte, a été une COP difficile, parce que beaucoup de défenseurs n’ont pas eu de visa. À Dubaï, l’an dernier, on était dans un pays dans lequel il n’y a pas de défenseurs. Pour la simple raison qu’ils sont soit en prison, soit à l’étranger en exil. Et l’Azerbaïdjan ça va être encore autre chose. Récemment, l’accord qui régit la sécurité dans les COP entre le pays hôte et les Nations unies a été dévoilé. Cela nous a permis de constater à quel point la parole y sera contrôlée, muselée. À Bakou il est interdit de dire un mot de la situation des droits humains en Azerbaïdjan ».
Les défenseurs dérangent le secteur des énergies fossiles
Si les défenseurs de l’environnement et du climat sont réprimés ainsi c’est parce qu’« ils dérangent les intérêts des entreprises des énergies fossiles et le narratif des dirigeants politiques », estime la directrice générale de la Fédération internationale des droits de l’homme, Éléonore Morel.
« Les défenseurs ne sont donc pas invités par les gouvernements en amont des COP pour connaître leurs attentes. Ils sont tenus à l’écart pendant des négociations. Et au retour, les gouvernements devraient de nouveau se réunir avec eux pour discuter de la meilleure mise-en-œuvre des décisions prises lors de la COP. Mais dans de nombreux pays, ce n’est malheureusement pas le cas », explique Michel Forst qui dénonce que « tout le processus se déroule à côté de celles et ceux qui sont les premiers affectés par les décisions prises par les États dans ces COP internationales. La conséquence : l’expertise réelle de cette société civile est totalement méconnue. Leur expertise vient du fait que ces défenseurs vivent en premier ligne du changement climatique et voient au quotidien à quel point leur environnement se dégrade. Mais leur voix n’est pas entendue ».
Pire, on essaye de les faire taire. Comme le rappelle pourtant la directrice générale de la FIDH : « les activistes du climat et de la biodiversité se battent pour notre futur ». Les protéger est donc indispensable.
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