Questions d’environnement – Les stations de sports d’hiver anticipent-elles assez l’impact du changement climatique?

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Cette semaine, les vacances d’hiver ont commencé en France, et avec elles l’un des temps forts de la saison touristique en montagne. Avec pas loin de 54 millions de « journées-skieur » par an, la France est la deuxième destination derrière les États-Unis. Mais, avec le réchauffement climatique, plus fort en montagne qu’en plaine, les surfaces enneigées tendent à s’amenuiser. Face à cette évolution, la Cour des comptes met en garde contre un modèle « à bout de souffle ».

La Cour des comptes relève qu’à l’horizon 2050 toutes les stations seront plus ou moins touchées. Seules quelques stations peuvent espérer poursuivre l’exploitation au-delà de cette date. Or, leur équilibre financier en partie porté par des aides publiques est déjà fragilisé.

Pour l’instant, leur adaptation repose essentiellement sur la production de neige artificielle. Selon l’Agence nationale de la cohésion des territoires, en 2022, 39% des pistes françaises ont été couvertes par de la neige artificielle. La France n’est pas un cas isolé en Europe, le ratio atteint même 90% en Italie.

Mais, la Cour des comptes met en garde. Au-delà des conflits potentiels quant à l’usage de l’eau, pour produire de la neige il faut de l’énergie et cela a un coût. Par ailleurs, l’efficacité du dispositif « tend à se réduire avec la hausse des températures ». Des ONG ont d’ailleurs récemment dénoncé le transport par camion d’au moins 70 tonnes de neige vers une station de ski des Vosges depuis un sommet.

Pas de modèle unique

Mais vers quel modèle peuvent-elles se diriger ? C’est là que le bât blesse. Il n’y aura pas de formule magique, « pas de modèle unique, estime Guillaume Dolques, de l’Institut de l’économie pour le climat. C’est le contraire de ce que l’on a vu jusqu’à aujourd’hui où la plupart des territoires de montagne se sont construits autour d’un modèle quasiment “prêt-à-porter” déployé avec du soutien public dans les années 1970. Ce modèle, on l’a vraiment multiplié et il a bien marché parce qu’il est très lucratif, poursuit-il. Aujourd’hui, il n’existe pas de modèle qui puisse remplacer poste pour poste le modèle du ski. Chaque territoire de montagne va devoir se poser la question de la manière dont elle se réinvente en se réappropriant son histoire, ses savoir-faire, ses savoirs industriels. Cela ne sera pas qu’une question de transition de modèle touristique ».

Certaines localités essaient bien de se diversifier. Mais, aux yeux de la Cour des comptes, c’est « rarement adossé à un véritable projet. Les initiatives des collectivités territoriales sont peu coordonnées entre elle », au risque de se faire« concurrence ». Les Sages de la rue Cambon regrettent surtout que cette diversification « se juxtaposent au soutien à la production de neige, sans réflexion sur l’articulation entre ces deux politiques ».

« Réorienter les investissements »

Ce rapport est publié alors que la France devrait accueillir les Jeux olympiques d’hiver 2030. Elle est, en effet, la seule candidate encore en lice. Une candidature contestée par des associations et riverains pour diverses raisons. Les détracteurs des JO 2030 s’inquiètent de leurs impacts sur l’environnement. Autre argument : le fait de perpétuer le modèle basé sur le tourisme du ski.

Au contraire, les JO « peuvent faire de la transition, un levier, nuance Guillaume Dolques. Cela va nécessiter de voir comment on peut faire vivre l’existant et comment on peut se servir de cet événement sportif pour réorienter les investissements vers des vraies questions d’adaptation ». Mais reconnait-il, « cela ne va pas se faire automatiquement. La tentation va être grande de flécher des investissements vers des enneigeurs ou vers des éléments pour pérenniser le modèle du ski alpin. Et cela serait une grave erreur ».

Le rapport de la Cour des comptes a fait grincer des dents l’organisation d’exploitants Domaines skiables de France (DSF), les associations nationales d’élus de la montagne (ANEM) et des maires de stations de montagne (ANMSM). Ils jugent que l’effort d’adaptation des stations a été minimisé.

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Source du contenu: www.rfi.fr

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