Questions d’environnement – Pourquoi faut-il protéger les zones humides?

Share

Ce vendredi, comme tous les 2 février, c’est la Journée mondiale des zones humides. L’Assemblée générale de l’ONU en avait décidé ainsi pour attirer l’attention sur ces milieux naturels aussi cruciaux que fragiles.

Qu’est-ce qu’une zone humide ? La définition n’est pas aussi évidente qu’il y paraît. « Il s’agit d’un milieu ou l’eau est présente en abondance, soit de manière permanente soit de manière saisonnière », explique Delphine Gramond, enseignante et chercheuse à Sorbonne Université et membre du Laboratoire Médiations. Cette eau peut être douce, saumâtre ou salée. Parfois ces eaux se mélangent, comme dans les zones humides côtières situées entre la mer et des fleuves. Marais, mangroves, tourbières, bords de lacs et de rivières ou herbiers marins – des sortes de prairies sous-marines, il existe une incroyable richesse de zones humides sur notre planète.

Pourquoi ces zones humides sont-elles si importantes ? Pendant longtemps, elles avaient une très mauvaise réputation. « La plupart du temps, elles étaient considérées comme des milieux infertiles. Et les populations faisaient une association directe entre zone humide, air putride et maladie, en particulier la malaria, raconte Delphine Gramond. S’il est vrai qu’il y a un lien entre moustiques et zone humide, le problème était les moustiques et non pas la zone humide en tant que telle. Donc des siècles durant, ces milieux ont été vus comme des endroits hostiles, dangereux qu’il fallait maîtriser, drainer, voire effacer du paysage. »

Multiples rôles

Aujourd’hui, le regard a changé. Les zones humides sont désormais connues pour rendre de multiples services. Tout d’abord dans le cycle de l’eau : en fonction de leur nature, de leur emplacement et de leur taille, elles vont jouer le rôle d’éponge, de filtre (du fait de leur végétation spécifique) ou encore d’amortisseur lors des crues ou des inondations de zones côtières. Elles sont donc aussi cruciales pour atténuer des risques naturels que pour recharger les nappes phréatiques.

Les zones humides sont aussi les plus importants réservoirs de biodiversité de notre planète. 40% des espèces dans le monde vivent ou se reproduisent dans ces écosystèmes. « Il existe des espèces très spécifiques que l’on ne retrouve que dans les zones humides, souligne Delphine Gramond. Certaines sont aujourd’hui menacées, comme la libellule qui dépend entièrement de ces milieux humides. »

À lire aussiLes zones humides au Bénin, des alliées contre le changement climatique

Certaines zones humides jouent également un rôle essentiel pour la séquestration du carbone. Les tourbières n’occupent certes que 3% de la surface terrestre mais contiennent environ un quart du stock mondial de carbone organique. Le revers de la médaille : quand ces zones humides sont perturbées, elles relâchent le carbone stocké dans l’atmosphère sous forme de CO2 et participent ainsi au réchauffement climatique.

Et enfin, « la zone humide permet de réguler les températures, fait savoir la chercheuse Delphine Gramond. C’est un milieu frais, ce qui permet un refroidissement local de l’air. Ainsi, la zone humide devient un outil pour lutter contre les vagues de chaleur, en particulier en milieu urbain ».

Par quoi ou qui les zones humides sont-elles menacées ?

La plupart des zones humides disparues au cours des siècles derniers se situaient dans les bassins de grands fleuves, comme le Yangzi Jiang en Chine, le Mississippi aux États-Unis ou le Danube en Europe centrale. Elles ont été asséchées par les populations pour s’y installer. Il est d’ailleurs difficile de quantifier les surfaces perdues. Les chiffres varient selon les études et les critères entre 35% et 80%. À partir des années 1950, le drainage des zones humides a souvent été subventionné par des programmes gouvernementaux pour favoriser l’agriculture, l’aménagement de pâturages ou encore la construction de zones urbaines. Et leur eau a été extraite pour des besoins domestiques ou industriels.

Aujourd’hui, les zones humides sont particulièrement touchées par la hausse des températures, le bouleversement de l’hydrologie, comme les sécheresses prolongées, ainsi que par la hausse du niveau des océans. Ces dernières années, il y a certes eu des progrès dans la protection des zones humides au niveau international. Mais la dégradation, voire la perte de ces milieux, vitaux pour l’humanité et la nature, se poursuit.

« De nombreuses mangroves par exemple – ces zones humides que l’on retrouve sur les littoraux des latitudes tropicales et équatoriales et qui assurent des vraies protections contre l’érosion, contre les tempêtes et contre les tsunamis – sont aujourd’hui menacées par l’aquaculture, alerte la spécialiste Delphine Gramond. Cela vient du fait que nous sommes de plus en plus nombreux dans le monde à manger des crevettes et que l’un des milieux les plus favorables pour faire de la crevetticulture, c’est la mangrove. Beaucoup de ces forêts humides sont aujourd’hui converties en parcs aquacoles. »

La préservation des zones humides est souvent freinée par des besoins économiques des populations. Par conséquent, les projets de protection doivent s’appuyer sur une approche intégrée qui inclut un accompagnement social des riverains.

Source du contenu: www.rfi.fr

Dernières nouvelles

Dernières nouvelles