Votre chronique environnement se penche sur la deuxième séquence de la transition énergétique de l’Union européenne. C’est ce qui attend la nouvelle équipe de commissaires, fraîchement confirmée par le Parlement européen, mercredi 27 novembre. Au cœur de ce nouveau mandat de l’exécutif européen, qui va démarrer le 1er décembre : la décarbonation de l’industrie du Vieux Continent.
La cheffe de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a promis de dévoiler dans les 100 premiers jours ce « Clean Industrial Act » ou « Pacte pour une industrie propre ». Mais de quoi s’agit-il ? Après le Pacte vert qui, lors de son mandat précédent, s’était attaché à établir une taxe carbone aux frontières, à fixer la fin des voitures thermiques pour 2035 ou encore à développer les énergies renouvelables, il s’agit désormais pour l’Europe de mettre tout cela en œuvre, de renforcer les filières des énergies propres, mais aussi de s’attaquer à la réduction des gaz à effet de serre émis par les industries lourdes. Production d’acier, de ciment, industrie chimique… Ces industries sont très gourmandes en énergies fossiles et donc participent grandement au réchauffement climatique.
« C’est une étape très importante, car combinées, ces industries lourdes représentent 15% à peu près des émissions de gaz à effet de serre en Europe, et si on rajoute toute l’industrie manufacturière dite légère, l’empreinte de ces émissions monte à 20-25% du total des émissions de gaz à effet de serre », explique Nicolas Berghmans, directeur des nouvelles politiques industrielles à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).
L’idée est que ces industries ne s’alimentent plus au charbon ou au gaz, mais à l’électricité ou à d’autres sources d’énergie propres. Cela signifie des investissements colossaux sur les sites de production. « Il faut parfois même modifier le procédé de production en lui-même », poursuit le spécialiste, par exemple pour fabriquer de l’acier décarboné.
Le Pacte pour une industrie propre proposera donc un ensemble de règles administratives et une série d’initiatives pour assurer un cadre clair et pour garantir des fonds, soit via des subventions publiques, soit en attirant des investissements privés. L’objectif : financer cette transformation coûteuse et accompagner les industries pour qu’elles la fassent tout en restant rentables, compétitives face à la Chine et aux États-Unis, et tout en garantissant une certaine stabilité des prix de l’énergie.
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« Installer les bonnes conditions économiques »
Cela ne va pas être facile. C’est même l’une des étapes les plus compliquées de la transition énergétique européenne qui attend le vieux continent. « Les technologies pour décarboner ces industries n’ont pas encore toutes été mises au jour, explique Domien Vangenechten, du groupe de réflexion européen E3G. Quand elles le sont, certaines ne sont pas encore à l’échelle ou bien elles coûtent cher. » Mais des progrès remarquables ont été faits ces dernières années, souligne le spécialiste. Il s’agit maintenant d’installer les bonnes conditions économiques pour que cette transformation cruciale ait bien lieu. Et ensuite s’assurer que les clients de ces industries lourdes achèteront les nouveaux produits, même s’ils coûtent un peu plus cher au début. « Par exemple, que les fabricants de voitures achètent ce nouvel acier vert », pointe Domien Vangenechten.
Pour fixer un cap clair, notamment aux entreprises, la Commission européenne doit aussi, dans les prochains mois, proposer un nouvel objectif intermédiaire de réduction des émissions carbone. Afin de respecter l’accord de Paris de lutte contre le changement climatique, l’UE s’est fixée l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050, d’avoir réduit de 55% ses émissions d’ici 2030. Elle devrait donc se fixer un nouveau point d’étape : atteindre moins 90% d’émissions d’ici 2040.
Mais le contexte sera difficile. Avec la réélection de Donald Trump, les Européens craignent une hausse des tarifs douaniers infligés par Washington aux produits européens. Les tensions géopolitiques sont fortes, les prix de l’énergie élevés, et la situation économique et politique incertaine, indique Domien Vangenechten, notamment en Allemagne et en France.
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