A Athènes, le parcours du combattant des piétons

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LETTRE D’ATHÈNES

« Regardez ! C’est un vrai parcours du combattant pour circuler à pied dans Athènes ! », enrage Ioanna Dimitriou tout en montrant les voitures garées à cheval sur le trottoir dans le quartier alternatif d’Exarchia, au centre de la capitale grecque. Avec son chariot plein de courses, la quinquagénaire doit faire des zigzags sur la route où circulent les véhicules : « Cette ville n’est conçue que pour les automobilistes, et les piétons vivent dangereusement ! » Sur les réseaux sociaux se multiplient les posts de citadins en colère contre le manque de trottoirs ou leur état déplorable, mais aussi contre les incivilités des conducteurs et des restaurateurs qui étalent leurs tables et leurs chaises en empêchant le passage des piétons.

Près de la place de Syntagma, face au Parlement grec, rue Voulis, @batman_for_athens, un compte Instagram d’Athéniens remontés contre le manque d’entretien de leur ville, révèle, vidéo à l’appui, que « pour marcher, tu dois littéralement aller sur la route ». Ici, les cafés ont envahi l’espace public sans autorisation, ne laissant que peu de place aux citoyens pour déambuler. D’après une recherche de l’Ecole polytechnique d’Athènes, quatre restaurants sur dix occupent illégalement ces lieux publics. En 2023, la police municipale a effectué plus de 5 000 contrôles et constaté plus de 2 000 entorses à la loi.

« Indigne d’une capitale européenne»

Pour Athanassios Frontistis, l’un des créateurs de la page Facebook Rendez les trottoirs aux piétons qui compte plus de 1 500 membres, « le problème est qu’il existe des lois protégeant les piétons mais qu’elles ne sont pas appliquées ». L’article 5 paragraphe 1 de la Constitution grecque garantit ainsi le « droit à l’utilisation des lieux publics par les piétons ». La Grèce a aussi signé la Charte européenne des droits du piéton de 1988. « Beaucoup ne savent pas non plus que les trottoirs doivent avoir des dimensions précises », souligne M. Frontistis. La loi prévoit qu’ils doivent faire au moins 2,1 mètres de largeur, notamment pour que les personnes en fauteuil roulant ou les malvoyants puissent se déplacer seuls.

Or, d’après l’étude de l’Ecole polytechnique d’Athènes, publiée fin janvier par le journal de centre droit Kathimerini, 37 % des trottoirs de la capitale grecque mesurent moins d’un mètre de largeur… et deux tiers ne respectent pas les dimensions requises par la législation.

Il y a trois ans, Athanassios Frontistis, professeur d’économie, a décidé d’agir afin que les espaces publics de la ville soient accessibles à tous. « Ma femme venait de glisser sur une dalle de trottoir décollée et s’était retrouvée avec un bras dans le plâtre », explique le sexagénaire qui décrit une « situation honteuse, indigne d’une capitale européenne ». Avec son collectif de citoyens en colère, il a interpellé dans une lettre la présidente de la République, le premier ministre, le président du Parlement et le chef de la police grecque. « Les municipalités ne réagissent pas depuis des années, mais nous ne pouvons plus vivre dans une ville où les personnes à mobilité réduite ne peuvent pas circuler, où les parents avec des poussettes luttent en permanence pour se promener à cause des voitures qui se garent sur les passages piétons… », s’insurge M. Frontistis.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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