Libéré dimanche 18 février, à l’aube, de l’hôpital de la prison où il était interné depuis août 2023, Thaksin Shinawatra, premier ministre de février 2001 à septembre 2006, dit « Thaksin », va pouvoir passer à domicile, sous le régime de la liberté conditionnelle, la seconde partie d’une peine d’un an. Cet aménagement a été consenti en raison de son âge, 74 ans, et de sa santé – dont les détails n’ont pas été révélés. Sa fille, la politicienne Paetongtarn Shinawatra, a montré une image de son père assis à côté de sa piscine, le bras dans une attelle, une minerve autour du cou et la mine pensive – une manière d’insister sur sa « convalescence », alors que l’opposition a fustigé le « double standard » de la justice.
Renversé par un coup d’Etat en 2006, Thaksin était rentré de quinze années d’exil, le 22 août 2023, pour purger une peine de huit ans de prison pour prise illégale d’intérêts, alors qu’il était premier ministre. Ce retour scellait un accord faustien entre le parti des Shinawatra, le Pheu Thai (Parti pour les Thaïlandais), second aux élections législatives de mai 2023, et ses anciens ennemis, à savoir les partis liés aux militaires et à l’establishment royaliste, pour former un gouvernement de coalition dirigé par l’un de ses cadres, Srettha Thavisin. En retour, la peine de Thaksin avait été réduite, par grâce royale, à une seule année, dont les six premiers mois ont été purgés dans une suite VIP de l’hôpital général de la police, à Bangkok.
M. Shinawatra devrait dorénavant recevoir des visites et s’exprimer sur les réseaux sociaux, ce qu’il n’a pas fait depuis son retour d’exil. Populaire et populiste, Thaksin a continué à donner le « la » de la politique thaïlandaise de son exil doré, à Dubaï. Car son parti, ou du moins ses avatars successifs, n’a cessé de remporter les élections jusqu’en 2023 et de fournir au pays des premiers ministres vus comme des « mandataires » de Thaksin – dont l’un de ses beaux-frères en 2008, et, surtout, sa propre sœur Yingluck Shinawatra, de 2011 à 2014. Elle fut alors, elle aussi, renversée par un coup d’Etat.
Plainte pour lèse-majesté
Aussi les questions fusent-elles sur le rôle que pourrait être appelé à jouer l’ancien premier ministre et, le cas échéant, sur la manière dont ses alliés de circonstance vont réagir à son retour dans l’arène. Sans doute pour freiner les ardeurs de ce grand fauve politique, le parquet a déclaré examiner une plainte pour lèse-majesté datant de 2016, à l’époque de la junte militaire, transmise par la police à l’approche de sa libération conditionnelle. Cette plainte porte sur une interview donnée à Séoul, en 2015.
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