L’Equateur sous l’emprise des gangs et du narcotrafic

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Dans un continent sud-américain en proie à d’innombrables secousses politiques, l’Equateur est longtemps apparu comme un havre de paix. Aujourd’hui, les habitants peinent à comprendre le déferlement de violence qui s’est abattu sur leur pays depuis la fin 2020. Pris en étau entre la Colombie et le Pérou, deux grands producteurs de cocaïne, le plus petit des pays andins est devenu le principal point d’exportation de la poudre blanche. Et le théâtre de luttes sanglantes entre groupes criminels rivaux.

L’Equateur est au cœur de la reconfiguration du trafic mondial de cocaïne. Celle-ci résulte d’une hausse rapide de la demande mondiale, de l’accord de paix signé en 2016 avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie – les FARC, qui contrôlaient jusqu’alors le marché de la coca –, de la désorganisation des circuits provoquée par la pandémie de Covid-19 et de l’arrivée de cartels mexicains, puis de la mafia albanaise.

Le trafic s’opère principalement par voie maritime. Au départ des criques escarpées de la côte Pacifique pour les petites cargaisons, à partir des ports équatoriens mal surveillés pour les plus grosses, dissimulées dans des conteneurs à destination de l’Europe. Cocaïne et bananes voyagent souvent ensemble.

Instaurée en 2000, la dollarisation de l’Equateur s’est révélée une aubaine pour le narcotrafic et le blanchiment de capitaux – déjà facilités par la corruption qui gangrène les institutions du pays. Les prisons, transformées en centres opérationnels des organisations criminelles, sont devenues le lieu de massacres : plus de 450 détenus y sont morts depuis 2020. La violence s’est ensuite étendue aux ports et aux villes. Les chiffres des homicides, enlèvements et extorsions sont à la hausse, partout dans le pays.

Pour venir à bout des gangs, le président Daniel Noboa a déclaré, le 8 janvier, « l’état de guerre intérieure » et désigné vingt-deux organisations criminelles comme « terroristes ». Depuis, l’armée et la police multiplient les opérations dans les centres pénitentiaires et les arrestations dans les quartiers misérables des villes équatoriennes. En trois semaines, plus de 4 000 personnes ont été arrêtées. Les organisations de défense des droits humains s’inquiètent, mais la population approuve la politique de fermeté du jeune chef de l’Etat, élu il y a moins de trois mois.

A l’Assemblée nationale et dans les médias, les responsables politiques se renvoient la responsabilité de la crise sécuritaire. Les détracteurs de l’ancien président socialiste Rafael Correa (2007-2017) lui reprochent d’avoir fermé la base militaire américaine de Manta et d’avoir pactisé en sous-main avec les organisations criminelles. Les corréistes considèrent pour leur part que le retour du néolibéralisme, depuis 2018, a affaibli l’Etat, dérégulé le système financier et appauvri les plus démunis.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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