Si pratiquement tous les pays européens et d’Amérique du Nord ont condamné la mort en détention d’Alexeï Navalny, vendredi soir, les pays dits du «Sud global» n’avaient pas encore réagi.
Sitôt connue, la mort dans une prison de l’Arctique de l’opposant Alexeï Navalny a suscité une avalanche de réactions indignées en Europe et aux États-Unis, où les hommages à son courage se sont multipliés ainsi que les accusations contre la Russie de Vladimir Poutine. Mais sans que des appels à un renforcement des sanctions contre le Kremlin soient lancés.
Premier officiel américain à réagir, le secrétaire d’État Antony Blinken a affirmé que «la Russie était responsable» de la situation qui a mené à la mort du principal opposant au chef du Kremlin. Accusation reprise peu après par la vice-présidente, Kamala Harris, qui y voit «un nouveau signe de la brutalité» de Vladimir Poutine. «Sa disparition dans une prison russe (…) souligne la faiblesse et la corruption au cœur du système que Poutine a bâti. La Russie en est responsable», a insisté Antony Blinken, depuis Munich, où il assiste, ce week-end, à la Conférence sur la sécurité.
La lumière sur les causes du décès
«Nous allons nous entretenir avec beaucoup de pays concernés par cette disparition», a-t-il ajouté, tandis que le conseiller à la sécurité nationale, Jack Sullivan, indiquait que, «étant donné la longue et sordide tendance du gouvernement russe à nuire à ses opposants, des questions évidentes se posent sur ce qui vient de se passer». Selon lui, Washington va chercher à confirmer l’information de son côté avant de «décider de la marche à suivre».
Une même exigence de vérité a été exprimée par le secrétaire général de l’Otan. «Je suis profondément attristé et inquiet (…), tous les faits doivent être établis et la Russie doit répondre à de sérieuses questions», a déclaré Jens Stoltenberg, lui aussi présent à Munich. De son côté, Emmanuel Macron a exprimé «colère et indignation» , saluant l’«engagement» et le «courage» d’Alexeï Navalny. «Dans la Russie d’aujourd’hui, on met les esprits libres au goulag et on les y condamne à mort», a fustigé le président de la République sur le réseau social X (ex-Twitter).
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Au Canada, le premier ministre Justin Trudeau a réagi en qualifiant Vladimir Poutine de «monstre». «C’est une tragédie qui rappelle au monde entier que Poutine est un monstre.» Selon lui, la mort de Navalny «démontre vraiment à quel point Poutine réprimera quiconque se bat pour la liberté du peuple russe», a dit le chef du gouvernement canadien à la chaîne publique CBC.
L’Union européenne tient également «le régime russe» pour «seul responsable de la mort tragique» d’Alexeï Navalny, a affirmé le président du Conseil européen, Charles Michel. Il «s’est battu pour les valeurs de la liberté et de la démocratie. Pour ses idéaux, il a fait le sacrifice ultime (…). Les combattants meurent, mais le combat pour la liberté ne s’arrête jamais», a indiqué Charles Michel dans un message sur X.
Un symbole qui demeure éternel
Même tonalité accusatrice chez le président ukrainien Volodomyr Zelensky, pour qui Vladimir Poutine devrait «rendre des comptes pour ses crimes». «Il est évident pour moi que (Alexeï Navalny) a été tué comme des milliers d’autres qui ont été torturés à mort à cause d’une seule personne, Poutine, qui ne se soucie pas de qui va mourir tant qu’il conserve sa position», a martelé le leader ukrainien lors d’une conférence de presse commune avec le chancelier allemand, Olaf Scholz, à Berlin.
Si celui-ci s’est dit «très attristé» par la mort de l’opposant russe, qui a «payé son courage de sa vie», sa ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, n’a pas hésité à affirmer que Navalny avait été délibérément tué parce qu’il représentait «plus que tout autre (…) le symbole d’une Russie libre et démocratique». «C’est précisément la raison pour laquelle il devait mourir», a-t-elle lancé.
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«C’est une terrible nouvelle, a abondé le premier ministre britannique, Rishi Sunak, sur le réseau X. «En tant que plus ardent avocat de la démocratie en Russie, Alexeï Navalny a démontré un incroyable courage tout au long de sa vie.» À Munich, son ministre des Affaires étrangères, David Cameron, a exprimé le souhait que nous tenions «Poutine pour responsable» de sa mort.
Le président de la Lettonie, Edgars Rinkevics, n’a pas hésité, lui non plus, à affirmer que l’opposant russe a été «brutalement assassiné par le Kremlin». «Quelle que soit votre opinion sur Alexeï Navalny en tant qu’homme politique, il vient d’être brutalement assassiné par le Kremlin. C’est un fait et c’est quelque chose qu’il faut savoir sur la vraie nature du régime actuel de la Russie», a déclaré Edgars Rinkevics sur le réseau social X.
L’Ukraine, l’autre combat d’ampleur
Semblable accusation est reprise par le chef de la diplomatie polonaise. Alexeï Navalny «était coupable d’avoir défié Vladimir Poutine. (…) Il a été mis en prison, où il a séjourné dans des conditions épouvantables. Vladimir Poutine est responsable de tout cela», a confié Radoslaw Sikorski à l’agence polonaise PAP. «Alexeï, nous ne t’oublierons jamais. Et nous ne leur pardonnerons jamais», a renchéri le premier ministre polonais, Donald Tusk.
«Les autorités russes et le président Poutine personnellement sont responsables de la disparition d’Alexeï Navalny», a, à son tour, accusé le premier ministre suédois, Ulf Kristersson, sur le réseau X. Le chef de la diplomatie tchèque, Jan Lipavsky, estime que le régime russe s’est transformé en «un état violent qui tue les gens qui rêvent d’un avenir meilleur». Quant à la diplomatie norvégienne, elle assure que le gouvernement russe «porte une lourde responsabilité» dans ce décès.
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Alors que la guerre en Ukraine se poursuit, le premier ministre belge, Alexander De Croo, «souligne que cette mort tragique souligne pourquoi nous allons continuer de soutenir l’Ukraine (envahie par la Russie depuis 2022). La Russie ne l’emportera pas en Ukraine.»
De son côté, le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, s’est dit «bouleversé» par la mort de l’opposant russe, «injustement emprisonné par le régime de Poutine pour sa défense des droits humains et de la démocratie». Le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, a affirmé que Madrid «exigeait que soient éclaircies les circonstances» de ce décès. Pour la première ministre italienne, Giorgia Meloni, cette disparition est «un nouvel avertissement pour la communauté internationale». «Nous espérons que pleine lumière sera faite sur cet événement inquiétant.»
Si pratiquement tous les pays européens et d’Amérique du Nord ont condamné la mort en détention d’Alexeï Navalny, vendredi soir, les pays dits du «Sud global» n’avaient pas encore réagi.
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