L’hebdomadaire américain Time avait publié sous la forme d’une correspondance de lettres les réflexions d’Alexeï Navalny en janvier 2022. La bête noire du Kremlin est morte à l’âge de 47 ans dans sa prison sibérienne.
Incarcéré dans une colonie pénitentiaire reculée de l’Arctique, où il est mort ce vendredi en purgeant une peine de 19 ans de prison, Alexeï Navalny n’avait plus qu’un seul canal de communication depuis son emprisonnement depuis janvier 2021 : ses réseaux sociaux. Sa dernière interview accordée à un média l’avait été via une correspondance d’octobre à janvier 2022 avec un journaliste de l’hebdomadaire américain Time .
Dans la série de la vingtaine de lettres manuscrites, Alexeï Navalny était revenu sur son étiquette de «terroriste» accolé au pied de son lit de prison. «(Vladimir Poutine) est celui qui a ordonné un acte de terrorisme – pour tuer un opposant politique. Mais c’est mon lit qui porte l’étiquette terroriste.»
Le militant avait évoqué son retour le 17 janvier 2021 en Russie, où il avait été immédiatement arrêté à son arrivée dans son pays. «Il n’y a eu aucune discussion avec mes amis, aucune conversation émotionnelle avec ma femme, écrivait-il depuis sa cellule. Dès l’instant où j’ai ouvert les yeux (après avoir été empoisonné le 20 août 2020), j’ai su que je devais revenir.»
«Ne pas attendre la mort physique de Poutine»
Alexeï Navalny, qui est décédé à l’âge de 47 ans, souhaitait «ne pas attendre la mort physique de Poutine» pour voir un changement politique en Russie, après plus de deux décennies de règne de l’actuel chef du Kremlin. Même en ayant recours à la force, puisqu’il estimait que le «chemin» de son pays «n’a jamais été parsemé de roses ».
L’opposant avait aussi critiqué le rapport de force entre les pays occidentaux et la Russie. Selon lui, le «déploiement des forces américaines en Europe de l’Est ou la possibilité que l’Ukraine rejoigne un jour l’alliance de l’OTAN» n’inquiétait pas réellement le président russe. Il comparait les États-Unis à «un écolier effrayé qui a été malmené par un camarade de classe supérieur», alors qu’il souhaitait que le pays dirigé par Joe Biden «touche directement à la fortune personnelle de Poutine» pour l’effrayer. L’éphémère candidat à l’élection présidentielle en décembre 2016 donnait aussi «l’origine de tous les conflits que la Russie mène avec l’Occident» : «l’espace de dissidence démocratique couvert par l’OTAN tout le long des frontières russes».
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Aucun regret d’être revenu en Russie
L’adversaire numéro 1 de Vladimir Poutine avait donné une explication pour expliquer le mode de gouvernance du chef d’État. «Pour consolider le pays et les élites, il a constamment besoin de toutes ces mesures extrêmes, de toutes ces guerres – réelles, virtuelles, hybrides ou simplement des confrontations à la limite de la guerre.»
Dans ses derniers échanges, Alexeï Navalny n’affichait aucun regret d’être revenu en Russie plutôt que d’être resté en exil et assurait que le président russe avait «aggravé les choses pour lui-même» en l’emprisonnant. «Il est clair qu’il s’agit d’une décision personnelle et émotionnelle de (sa) part. Premièrement, je ne suis pas mort du poison. Ensuite, je ne suis pas devenu un légume comme le craignaient les médecins. Ensuite, j’ai eu le culot non seulement de revenir en Russie, mais aussi d’ouvrir une enquête sur la corruption de Poutine.»
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