Le 5 novembre, les électeurs américains se rendent aux urnes pour choisir qui sera leur président pour les quatre prochaines années. Mais contrairement à la France, le système américain est indirect : les électeurs ne désignent pas une personne mais la couleur politique des grands électeurs de leur Etat. Ce sont eux qui forment le collège électoral chargé de désigner officiellement le chef de l’Etat fédéral. Cette « deuxième élection présidentielle » se tiendra le 17 décembre.
Dans la quasi-totalité des Etats (48 sur 50, ainsi que dans le District de Columbia, qui n’est pas un Etat mais est représenté au collège électoral), quand un candidat est en tête, il « remporte » tous les grands électeurs : ainsi, avec 50 % des suffrages plus une voix, le candidat en tête envoie tous les grands électeurs acquis à sa personne au collège électoral. C’est la règle du winner-take-all, « le gagnant prend tout ».
Qui peut être grand électeur ?
L’alinéa 2 de l’article II de la Constitution des Etats-Unis dispose que le président et le vice-président sont choisis par des grands électeurs « de la manière prescrite par sa législature », mais sans conseiller ni lister aucune manière. En revanche, cet article précise bien qu’« aucun sénateur ou représentant (…) ne pourra être nommé électeur ». Dans les faits, ce sont souvent des personnalités qui ont rendu un service au parti ou au candidat : adhérents du parti, lobbyistes, officiels locaux ou même personnel politique à la retraite (en 2016, Bill Clinton était grand électeur pour son épouse), comme le mentionnait la BBC en 2020.
Finalement, avant l’élection proprement dite, chaque parti désigne des grands électeurs potentiels dans tous les Etats.
Combien y a-t-il de grands électeurs ?
Le collège électoral américain compte 538 grands électeurs, il faut donc obtenir le soutien de 270 d’entre eux pour gagner l’élection présidentielle. Leur nombre est proportionnel à la population de chaque Etat (l’équivalent de l’addition entre le nombre de sénateurs et de représentants de l’Etat), avec un minimum de trois grands électeurs. Ce mode de calcul conduit à une légère surreprésentation des Etats peu peuplés, comme l’Alaska, le Wyoming ou le Vermont, qui comptent trois grands électeurs pour respectivement 733 536, 586 485 et 647 818 habitants (soit plus de quatre grands électeurs pour un million d’habitants), alors que la majorité des Etats ont en moyenne un à deux grands électeurs par million d’habitants.
Après un recensement de population, la répartition des grands électeurs a légèrement changé en 2024 : la Californie en a perdu un, tout comme le Montana, la Caroline du Nord ou l’Etat de New York, alors que le Texas en a gagné deux (passant de 38 à 40 représentants). Le poids de la Floride (de 29 à 30) ou du Colorado (de 9 à 10) a aussi augmenté.
Les équilibres politiques dans la plupart des Etats assurent quasiment la victoire à un camp ou à l’autre (la Californie, le Colorado ou l’Etat de New York votent historiquement pour les démocrates, l’Alaska, l’Idaho ou l’Alabama pour les républicains). Les candidats se rendent moins souvent dans ces Etats, puisque leur victoire y est soit acquise, soit presque impossible.
Un grand électeur est-il tenu de respecter le vote de son Etat ?
Trente-trois Etats ainsi que le District de Columbia ont des lois qui obligent les grands électeurs à suivre le vote populaire pour éviter une situation de « grand électeur déloyal » (faithless elector) en imposant soit une amende (500 dollars en Caroline du Nord et l’annulation du vote), soit un électeur remplaçant, comme dans le Montana, le Nevada ou l’Etat de Washington.
Les grands électeurs étant désignés par les partis ou par les candidats, les cas de « trahisons » sont rares. Il y en a eu néanmoins : lors de l’élection de 2000, la grande électrice démocrate Barbara Lett-Simmons s’est ainsi abstenue de voter plutôt que de donner son vote à Al Gore. Cet épisode n’a rien changé à l’élection puisque le républicain George W. Bush a gagné avec 271 voix sur 538.
Est-il possible de gagner en nombre de voix et d’avoir une minorité de grands électeurs ?
L’élection présidentielle américaine est une élection indirecte, il est donc possible d’obtenir la plus grande part des suffrages à l’échelle du pays (popular vote), mais de ne pas décrocher une majorité de grands électeurs au sein du collège électoral.
Dans l’histoire des Etats-Unis, c’est arrivé cinq fois, dont deux fois au XXIe siècle : en 2000, lorsque le démocrate Al Gore a obtenu 543 895 voix de plus que le républicain George W. Bush, et en 2016, quand la démocrate Hillary Clinton a reçu 2,86 millions de suffrages de plus que le républicain Donald Trump.
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