A La Baignoire, à Paris, « ces crevettes impériales juste snackées dévoilent une chair abondante et ferme »

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Si la jeune Américaine de la série Emily in Paris passait par là en soirée, nul doute qu’elle s’exclamerait « Oh my God, it’s so cute ! », car le romantisme à la parisienne s’illustre à La Baignoire, à tous les égards. Dehors : une rue isolée, piétonnière et pavée, éclairée au réverbère face à une église. Dedans : un comptoir de poche (quatorze couverts) intimiste où les tables sont nappées de blanc et les étagères ornées d’objets désuets – livres jaunis par le temps, flacons de parfum vides et soupières. Avec, ce soir-là, des couples dînant à la lumière de chandelles dégoulinantes de cire sous les mélodies sensibles de la Canadienne Feist.

Ici, le romantisme ne s’exprime pas dans de classiques plats français, mais dans une cuisine passionnée aux accents méditerranéens. Celle de la cheffe associée Cécile Lévy. Après dix-sept ans passés du côté de Tel-Aviv – à l’hôtel cinq étoiles The Norman – et de Jérusalem, où elle a atteint la demi-finale de l’équivalent local de « Top Chef », la jeune femme a pris ses quartiers à Paris, en 2021. D’abord chez Tekés, l’un des repaires parisiens du chef israélien Assaf Granit, qu’elle a rencontré pendant l’émission. Ensuite, depuis l’été 2023, à La Baignoire, son premier-né.

A la carte, onze assiettes (sans distinction entre les entrées et les plats), chacune centrée sur un ou deux produits travaillés dans leur intégralité. Les associations sont singulières : des pommes de terre façon risotto aux palourdes, des poireaux avec des mûres… On peut se laisser guider dans un menu en trois ou cinq temps, ou choisir librement.

Douce émulsion de carotte

Nous jetons notre dévolu sur le best-seller, une assiette autour de la crevette et de la carotte. Servie dans de la porcelaine, c’est une belle claque. Les crevettes impériales – « biologiques, du primeur voisin Terroirs d’avenir, arrivées encore vivantes en cuisine », note la cheffe – sont juste snackées et dévoilent une chair abondante et ferme. Comme partenaires : des carottes glacées au miel de fleur d’oranger. Le duo baigne dans une délicate bisque du crustacé. Cécile Lévy l’aime simple, sans ajout de crème ou de légumes autres que la carotte, ce qui lui confère cette couleur orange profond, et y ajoute une goutte de pastis.

Au fil des coups de fourchette – en argent –, la soupe, légère, se mêle aux multiples condiments : un épais sabayon safran, une douce émulsion de carotte, une huile vive de céleri, peau de carotte et piment. Avec, parsemés, un peu de poivre Timut et de fenouil bronze anisé. Le jeu de textures est fabuleux. Enivré par le mix subtil d’iode, de safran et de fleur d’oranger, on sent finalement peu la carotte.

L’assiette ensoleillée transporte loin de Paris et nous fait promettre de ne plus jamais déguster de crevettes avec un basique beurre blanc persillé. Comme scande la cheffe marseillaise : « C’est presque une bouillabaisse, entre la bisque, qui joue le rôle de bouillon, et le sabayon, celui de la rouille. » Une soupe où l’on ne trempe pas de croûtons, mais une délicieuse hallah – la brioche juive ici imbibée d’huile d’olive – jusqu’à retrouver le blanc immaculé de l’assiette.

La devanture du restaurant La Baignoire, à Paris, dans le 2ᵉ arrondissement.

Crevette cristal : 22 € l’assiette. La Baignoire, 7, rue Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle (Paris 2e). Ouvert ­uniquement le soir, tous les jours, sauf le dimanche.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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