Arnaud Dalibot, restaurateur : « J’ai toujours rêvé de proposer du sorbet aux prunes comme le faisait ma grand-mère : artisanal, savoureux, accessible à tous »

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Ma mère cuisine très bien, mon père adore acheter des bons produits. Je ne dis pas que nous n’avons jamais eu de pizza surgelée pour le dîner quand ils sortaient le vendredi soir, mais la nourriture tenait une place importante chez nous. En vacances aussi, chez mes grands-parents paternels, en bord de mer, dans le Finistère, comme chez mes grands-parents maternels, à la campagne, en Mayenne.

Chez les premiers, c’étaient crustacés et poissons frais tout l’été, chez les seconds, on se goinfrait de cerises, de prunes cueillies dans les arbres et de framboises du jardin. Ma grand-mère faisait des confitures, du vin de framboise, des pâtes de fruits, des sirops, des glaces. C’était simple, sans prétention et délicieux, j’en ai des souvenirs indélébiles.

J’ai fait des études d’économie et d’anglais à Nanterre et une école de commerce à Rouen, avant de travailler chez Moët Hennessy comme contrôleur de gestion, puis dans le marketing et la vente, à Paris, à Tokyo et à New York. Je suis resté chez LVMH pendant treize ans. J’ai peu à peu pris du galon, c’était confortable, je maîtrisais tous les aspects financiers, mais, pour continuer de monter les échelons, il fallait entrer dans le jeu du pouvoir. J’ai compris alors que cela ne m’intéressait pas.

Une mise en cohérence

J’ai décidé de mettre mes compétences au service de quelque chose qui me tient vraiment à cœur et j’ai donné ma démission en 2011. Puis, pour me mettre les idées au clair, j’ai fait un voyage de deux mois en Amérique du Sud. J’étais seul, je réfléchissais dans la nature, comme plongé dans une sorte de méditation mobile et perpétuelle. Un jour, en Bolivie, après un long trajet de nuit en bus, à l’aube, tout s’est décanté et j’ai eu la vision de la trilogie restaurant-ferme-épicerie.

Cela faisait longtemps, en réalité, que l’idée de Mûre mûrissait en moi. Le restaurant, parce que j’aime cuisiner et nourrir les gens ; la ferme, parce que j’avais vu les marchés bio fermiers à New York et que je savais que c’est vers ce type d’agriculture et de lien ville-campagne qu’il faut tendre ; et l’épicerie, qui vient d’ouvrir, pour compléter le modèle économique, mais surtout parce que j’ai toujours rêvé de proposer du sorbet aux prunes comme le faisait ma grand-mère – artisanal, savoureux, accessible à tous. C’était une mise en cohérence, un alignement de tout ce qui me fait plaisir, qui a du sens pour moi. Et un défi aussi : celui de montrer que l’on peut arriver à vivre de ses rêves.

Pendant le confinement, alors que le restaurant était fermé mais que la ferme produisait à plein régime, j’ai retrouvé le temps de jardiner et de cuisiner, de composer avec les produits du moment, de jouer avec les saveurs salées et sucrées du potager. Cette quiche est née ainsi. Il fallait utiliser les poireaux qui montaient en fleur, les adoucir avec la courge, les raviver un peu avec l’oseille qui poussait à foison. Et lier tout cela avec les œufs de nos poules. C’est un plat que nous proposons, en saison, au restaurant, qui est le reflet du jardin et de tout ce qu’on sème, les idées comme les graines.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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