Depuis son arrivée à Paris, à l’âge de 18 ans, Sarah Ueta évolue dans le monde de la mode où elle a travaillé comme attachée de presse pendant près de vingt ans. Les choses auraient probablement continué ainsi sans le Covid-19. « Comme pas mal de gens, pendant le confinement, je me suis mise à cuisiner. J’ai mis au point trois recettes de bento à ce moment-là : végan, à la viande et au poisson. Je n’imaginais absolument pas en faire un métier, mais certains de mes amis m’ont incitée à ouvrir un restaurant. » La jeune quarantenaire se souvient d’un goût marqué pour la nourriture développé très tôt, en constatant que sa mère la félicitait quand elle finissait son assiette. « J’adore découvrir de nouvelles saveurs et chercher à reproduire celles que j’ai aimées. »
En 2021, Sarah saisit l’opportunité de tester en vrai son idée de bento : elle est accueillie en résidence culinaire chez The Broken Arm, un concept store du Marais, à Paris. La sauce prend. Convaincue qu’il y a une place à se faire, elle se met en quête d’une adresse. Elle rêve un temps d’un food truck mais en raison des difficultés de stationnement dans Paris, elle opte plutôt pour ce petit local du quartier de la porte Saint-Denis, occupé par un salon de thé qui propose des cookies. « La propriétaire était pressée de partir, alors les choses se sont enchaînées rapidement. »
Le restaurant Iné est né au début de l’été 2023. Pourquoi Iné ? « Le symbole phonétique (kanji) Iné signifie “épi de blé”. Cela collait bien avec ce côté healthy de la nourriture proposée. Mais surtout ma mère s’appelle Inaba. Or, Ina et Iné, c’est le même kanji en japonais. » Iné est un peu une histoire de famille. Le père de Sarah (aujourd’hui décédé) en a dessiné le logo. C’est encore lui qui a aidé sa fille à choisir les matériaux et à décorer le lieu : du bois blond, du ciment au sol, des murs immaculés.
Et l’immense miroir mural qui n’en finit pas de réfléchir. « Les clients aiment bien se prendre en photo en attendant leur plat », s’amuse-t-elle. Il permet surtout d’agrandir astucieusement l’espace, qui est compté : 40 mètres carrés pour une cuisine et une salle, c’est peu, même si l’équipe est réduite.
Une organisation au cordeau
Sarah travaille main dans la main avec le chef Takuma Naito (38 ans) – « Je l’ai croisé pendant le Covid et il m’a dit que si un jour je montais un lieu, il voulait absolument participer à l’aventure » – qui imagine la carte et se fait aider de deux commis de cuisine : Megumi Morooka et Shinobu Wakana-Guillet. Quand il faut sortir 200 à 250 repas par jour pendant les défilés, l’équipe doit se dédoubler et renoncer à sa ration de sommeil. La petite cantine japonaise ne draine pas encore une clientèle suffisante, la rue d’Enghien n’étant pas très passante.
Il vous reste 52.46% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Source du contenu: www.lemonde.fr