Chez Table Penja, à Paris, « le ris de veau s’accompagne de grains de moutarde à l’hibiscus et d’un étonnant condiment iodé à l’anchois »

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Chercher un restaurant dans le 7e arrondissement parisien, l’un des plus chers, c’est longer de vastes avenues calmes et avoir envie de tester de belles tables comme le franco-coréen Mojju ou la classique Fontaine de Mars, sans parler des étoilés du quartier où il nous est arrivé de régler d’effrayantes additions. Mais ce soir, c’est l’Afrique qui nous aimante.

Table Penja est un lumineux restaurant ouvert en octobre par le chef d’origine camerounaise Pierre Siewe. Passé par les cuisines du Savoy à Londres et formé par Yves Camdeborde, il a concocté pendant une bonne décennie de remarquables assiettes bistronomiques au Garde Temps, son précédent établissement de Pigalle.

Pas encore prise d’assaut, sa nouvelle adresse distille une atmosphère tranquille. Le chef et son second s’activent aux fourneaux, épaulés en salle par un service diligent. Le décor contemporain est éclaboussé d’une tapisserie aux tons vifs, tandis que les claustras de terre ocre rappellent les murs en pisé du continent noir ou les palais de Marrakech. Or, les recettes d’ici n’ont rien à voir avec les maffés, thiéboudiènes ou poulets yassa qu’on peut savourer par exemple au Waly-Fay, historique restaurant africain du quartier Charonne.

Pierre Siewe réinterprète la gastronomie française, et l’Afrique s’exprime à travers les épices : en entrée, le mini-poireau et salsifis est relevé de pébé, sorte de noix de muscade, tandis que le ceviche de dorade et bulots a recours à des rondelles du Cameroun, une épice qui remplace avantageusement l’ail et l’oignon.

Un peu de cacao râpé

Tant qu’à manger français, on choisit le ris de veau. Comme le poulpe grillé nappé de sauce ébène, c’est un classique qui reste à la carte quand le menu change tous les mois. Composé dans une palette de brun, rose, orange et vert, le plat est somptueux. On le savoure d’abord avec les yeux. Puis vient le premier coup de fourchette. Le goût acide et sucré du fruit de la passion stimule la douceur de la patate douce, tous deux alliés en purée. Le cœur de ris de veau s’accompagne de pakchoï (chou chinois), à l’amertume subtile, de grains de moutarde à l’hibiscus et d’un étonnant condiment iodé à l’anchois.

Des saveurs opposées jouent dans l’assiette sans dénaturer l’abat qui se dissimule sous la garniture à côté de son jus braisé. Cuit impeccablement, il est à la fois ferme et moelleux, d’une fadeur délicate, comme les morceaux de patate douce rôtie posés sur la purée orange. L’association fonctionne à merveille. Le chef a râpé au dernier moment un peu de cacao pur, non sucré.

L’intérieur du restaurant Table Penja, la nouvelle adresse du chef d’origine camerounaise Pierre Siewe.

A la table d’à côté, une dame du quartier raconte à ses petites-filles qu’elle a été décorée pour son engagement associatif, tout en déplorant le manque de tendreté du veau qu’elle a choisi. Espérons qu’elle s’est régalée au dessert : glace au poivre vert, riz au lait surmonté de nougatine de noix de coco ou ganache de chocolat, moringa et aloé véra, tout était parfait.

Table Penja, 2, rue Sédillot, Paris 7e. Ouvert du mardi au samedi, midi et soir. Ris de veau : supplément 25 € dans le cadre du dîner entrée/plat/dessert à 55 €.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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