Une nuit sans lune, une brume à couper au couteau : la Cité internationale de la gastronomie et du vin de Dijon ne pouvait rêver meilleure ambiance pour célébrer, en ces premiers jours de novembre, el Dia de muertos, la fête des morts mexicaine, en se parant de squelettes hilares et d’un autel joyeusement macabre. Après Lyon et Paris, la ville bourguignonne était la troisième étape qui accueillait, cette année, le Festival Qué Gusto, consacré aux saveurs mexicaines. Et les visiteurs étaient au moins aussi surpris par les faux crânes aux maquillages bigarrés que par les spécialités culinaires.
Sur un stand, on pouvait tester le chocolat Purokao, élaboré à la manière des Mayas par un couple français : un épais palet à base de cacao peu raffiné, corsé, à faire fondre dans de l’eau ou du lait. Juste en face, on découvrait une autre marque tricolore, Salsa, apposée sur des sauces mexicaines artisanales plus ou moins brûlantes, cuisinées à partir de piments cultivés dans les Deux-Sèvres. Tandis que, dans le restaurant de la Cité, on dégustait des plats imaginés par la cheffe Lydia Gonzalez : du piment farci de fromage frais et de pickles, ou du filet de bœuf dans une sauce parfumée au sotol, un spiritueux aux notes herbacées. Une claque, même pour les gourmands les plus blasés.
« La gastronomie mexicaine reste méconnue en France, regrette Ximena Velasco, la fondatrice du Festival Qué Gusto. Elle est encore confondue avec la cuisine tex-mex, née au Texas, dans le sud des Etats-Unis, à base de tortillas de blé – nous utilisons des tortillas de maïs, sauf dans le nord du Mexique –, de haricots rouges – nous privilégions les noirs –, de fromage semblable à du cheddar – alors que chez nous le fromage frais domine. Bref, le tex-mex est une déclinaison lointaine, très grasse et salée, de ce qui se fait vraiment au Mexique. Certaines spécialités qui nous sont attribuées, comme le chili con carne, sont de pures inventions. »
Inscrite depuis 2010 au Patrimoine de l’Unesco, la gastronomie mexicaine commence tout juste à conquérir les Français. Mais elle est, en général, associée aux taquerias, les établissements spécialisés dans les tacos. Or, ces petites galettes de maïs ne sont, rappelle Ximena Velasco, qu’une « manière de manger, comme le sandwich, et non un plat en soi ». Le pays a bien plus à offrir, comme le prouve une nouvelle génération de chefs. On pourrait presque écrire de « cheffes », car ce sont très majoritairement des femmes qui portent cette cuisine en France, à l’image de Carla Kirsch Lopez, qui propose à Lyon un menu gastronomique, dans un établissement au look d’hacienda, Alebrije, épaulée par une brigade 100 % féminine.
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Source du contenu: www.lemonde.fr