A la mi-octobre, à Paris, tandis que galeristes, marchands, curieux et collectionneurs d’art se pressaient dans les vernissages, cocktails et expositions de la foire Art Basel, un autre genre d’accrochage se tenait rue de la Paix. Au sein de la boutique du joaillier Mellerio, fondé en 1613, étaient exposées 26 pièces constituant un précipité de l’art du XXe siècle : Picasso et Braque, Dalí et Cocteau, Fernand Léger et Louise Bourgeois, Lucio Fontana et Jeff Koons…
Aucun tableau et aucune sculpture, pourtant : uniquement des broches, bracelets, bagues ou colliers appartenant à Diane Venet. L’épouse de Bernar Venet, connu pour ses sculptures magistrales d’acier aux lignes courbées, est l’une des plus grandes collectionneuses de bijoux d’artiste au monde. « J’ai découvert l’art lorsque j’étais étudiante, à la fin des années 1960, à New York, grâce à un petit ami qui m’emmenait dans les galeries, se souvient-elle. J’ai ainsi trouvé cette broche en émail de Roy Lichtenstein pour 3 dollars. Sans savoir que cette passion allait devenir ma vie. »
D’une vitrine à l’autre, on croise une compression du sculpteur César, une version plate en petit pendentif, façonnée avec ses bijoux d’enfance, la broche en ferraille que le plasticien Robert Rauschenberg lui avait bricolée, ou encore un collier jaune de 2016 en corde peinte et rigide signé par le peintre Claude Viallat. « Je lui ai réclamé à plusieurs reprises de me faire un bijou. Il ne voulait jamais, disant qu’il n’avait jamais fait une telle chose, même pour sa femme ou sa fille. Et puis, un jour, je l’ai reçu par surprise… et par la poste ! », se raconte-t-elle.
Exposés à La Piscine de Roubaix en 2008, au MAD de Paris en 2018 ou à la Villa Empain à Bruxelles en 2023, les trésors de sa collection (220 pièces à ce jour) font un détour de quelques jours par Mellerio, avant une future exposition au Norton Museum of Art de West Palm Beach, en avril 2025.
L’œuvre en miniature
A cheval entre deux arts, les bijoux d’artiste continuent d’être inclassables, pas toujours compris ni vraiment anoblis. Pourtant, ils ont bénéficié d’un regain d’intérêt ces dix dernières années. Des expositions et des ventes aux enchères dédiées ont permis de faire connaître les œuvres miniatures de grands artistes du XXe siècle.
Quelques galeries ouvertes à Paris, Bruxelles ou Londres perpétuent la tradition avec des plasticiens vivants. La marque Celine a lancé des éditions à petite échelle, avec les fondations et ayants droit de signatures établies : 200 compressions de César en 2020, 50 amulettes en bois de la sculptrice américaine Louise Nevelson en 2022, 100 pendentifs de Jean Arp cette année.
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Source du contenu: www.lemonde.fr