Nidta et Félix Robert, du restaurant Arborescence : « C’est aussi en sortant des sentiers battus qu’on comprend les produits qui nous entourent »

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Alors que beaucoup de restaurants copient les uns sur les autres, se repiquent déco et recettes tendance, le couple Nidta et Félix Robert – elle responsable de la salle et des vins, lui des cuisines – a créé un établissement hors norme à Croix (Nord). Isolé derrière une enceinte verte d’arbres et de bacs contenant des herbes aromatiques, Arborescence est une bulle hors du temps, mais surtout de l’espace. On vient ici pour explorer de nouvelles contrées gustatives, métissant le nord de la France et l’Asie du Sud-Est, car le tandem aux commandes réussit le pari fou d’associer produits en circuit court et saveurs d’ailleurs, comme cette langoustine au gingembre (belge) ou ce homard à la coriandre vietnamienne (du Nord).

Vous faites une cuisine exotique avec des ingrédients locaux, est-ce que ce n’est pas un peu absurde ?

Félix Robert : Ce qui serait absurde, c’est de manger tout le temps la même chose ! Dans le Nord, il y a beaucoup de produits clichés, comme l’endive ou la pomme de terre, dont on finit par se lasser. Et, dans beaucoup d’étoilés français, on retrouve des trames identiques : le même pain brioché feuilleté, le lièvre à la royale… Personnellement, ça m’ennuie un peu.

Nidta Robert : Notre idée, chez Arborescence, c’est d’utiliser des produits frais cultivés en France, le plus souvent dans notre région, ou des épices bien sourcées, comme celles de Roellinger, pour emmener les clients vers un ailleurs. On va, par exemple, cuisiner une feuille d’oseille, mais avec du curry vert maison – à base de coriandre, cumin torréfié, feuille de combava… – pour réaliser un plat qui ne ressemble à rien de déjà mangé. Ce n’est une cuisine ni de terroir ni typiquement exotique, puisque ce n’est pas la recette traditionnelle du poulet au curry vert qu’on pourrait trouver en Thaïlande.

La cuisine traditionnelle du Nord ne vous intéresse-t-elle pas ?

Félix Robert : Si, bien sûr ! D’ailleurs, notre dernier repas à l’extérieur, c’était à L’Estaminet de l’ancienne maison commune, à Hondeghem (Nord), où l’on a commandé un potjevleesh excellent, un plat de trois viandes en gelée. Le terroir peut être passionnant s’il y a un vrai travail réalisé sur le plat, ses racines, sa finesse. Mais ça nous semble vain de répéter des choses existantes. Je suis né à Lille, j’ai grandi dans les Flandres, et je pourrais tout à fait reprendre les recettes que ma grand-mère m’a apprises et qu’elle tenait de sa tante, mais ce qu’on aime, c’est expérimenter. C’est aussi en sortant des sentiers battus qu’on comprend les produits qui nous entourent. On se retrouve dans la démarche d’Alexandre Gauthier [chef de La Grenouillère et de Sur Mer, dans le Pas-de-Calais] qui fait une « cuisine de territoire » plutôt que de terroir, et qui s’affranchit des lieux communs.

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Source du contenu: www.lemonde.fr

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