Les ambiguïtés du cinéma français et du monde de l’audiovisuel devant la vague #MeToo resurgissent en ce moment avec l’ouverture du festival de Cannes.
Le #MeToo du cinéma a désormais une égérie, Judith Godrèche, à l’origine d’un témoignage dans Mediapart, en février, qui a abouti à deux plaintes contre les réalisateurs Jacques Doillon et Benoît Jacquot. L’actrice, qui a accusé le cinéma d’être « une couverture pour un trafic illicite de jeunes filles » a obtenu la création d’une commission d’enquête parlementaire sur les violences sexuelles dans le 7e art et l’audiovisuel. Ce n’est donc sans doute pas, par hasard, si une rumeur partie des réseaux sociaux évoquait une prétendue enquête de Mediapart mettant en cause dix grands noms du cinéma français.
Avant que le journal en ligne ne démente cette rumeur, il y a eu, on le sait, une sorte d’emballement. Sur C8, notamment, Cyril Hanouna a évoqué une « liste explosive de dix gros noms du cinéma français », sans en citer un seul. En réalité, un nom est sorti, celui du producteur Alain Sarde, accusé par neuf femmes de viol et d’agression sexuelle dans le magazine Elle. La rumeur est venue en réalité parasiter un combat.
Le monde de la télévision doit lui-même composer avec cette vague #MeToo
Bien sûr, d’abord parce que les films sont souvent préachetés ou financés par des chaînes, d’abord Canal+, puis France 2 et France 3, lesquelles les diffusent ensuite. Les films Belle de Benoît Jacquot et CE2 de Jacques Doillon ont vu leur sortie suspendue et on ne sait pas quand ils sortiront. France Télévisions, partenaire du Festival de Cannes, indique avoir « pris le parti de la parole des femmes ». Il a financé Moi Aussi, le film de Judith Godrèche, s’interdit tout hommage à Gérard Depardieu et il a fait savoir qu’il suspendrait tout film sur lequel porte des révélations. En réalité, c’est un peu plus compliqué puisque le film Petite Nature, réalisé par Samuel Theis, est bien présent sur la plateforme France.tv. Or cet acteur est mis en cause dans une affaire de viol par un technicien sur le tournage d’Anatomie d’une chute.
Le Centre national du cinéma est également concerné
Le CNC a développé depuis 2020 des formations obligatoires contre les violences sexuelles et sexistes pendant ou en marge des tournages. Seulement, cette même année, son président ? Dominique Boutonnat est accusé d’agression sexuelle par son filleul de 21 ans pendant ses vacances. Il sera jugé le 14 juin pour cela. Mais la publication par Libération des PV d’audition se révèlent assez accablante.
Lundi, c’est donc en brandissant la Une du journal titré « L’homme qui embarrasse le cinéma français » qu’une centaine de professionnels ont demandé sa démission devant le CNC. À leur tête, Judith Godrèche.
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