En France, près de trois semaines après la rentrée scolaire, plusieurs milliers d’élèves sont toujours à la rue. À la veille de la reprise des cours, l’Unicef, l’agence des Nations unies des enfants, comptait 2 043 mineurs sans hébergement, au lieu de 1990 à la même période. Une situation, sous-estimée, l’Unicef le reconnaît, puisque sont comptabilisés uniquement les enfants dont les parents ont fait une demande d’hébergement d’urgence et n’ont rien obtenu. Sont donc exclus de ce calcul, les familles qui vivent en squats, en bidonville ou qui ont cessé de faire des demandes, faute de réponse positive.
À Lyon, troisième ville de France, les familles d’une vingtaine d’enfants n’ont trouvé d’autres solutions que de dormir dans l’école d’un de leurs enfants, neuf établissements occupés en tout, grâce à l’intervention d’un collectif. À l’heure où les parents viennent récupérer leurs enfants à l’école, ceux de Mariam, cinq ans, la rejoignent pour y passer la nuit. « Je dors dans la salle de musique parce qu’on n’a pas de maison », explique la petite géorgienne qui nous guide avec fierté dans les couloirs de cette école, qui est aussi son refuge depuis huit mois. Quelques chaises, une table contre un mur et un grand tableau noir. Il faut de l’imagination pour ne plus y voir une salle de classe, mais bien une chambre d’enfant. Comme chaque soir, la famille doit, avant cela, récupérer, dans le gymnase, ce qui lui servira de lit.
Même si la situation est tolérée par la mairie, la famille doit se faire discrète. « Il faut que tous les matins, à 7h20, ils aient libéré l’école pour qu’il n’y ait pas de suspicion de leur trace, il faut que tout soit dans l’État dans lequel ils l’ont trouvé », explique Alexandra Grasset, une mère d’élève qui les accompagne.
Une discrétion qui arrange bien la jeune Mariam, dont les camarades de classe ne sont pas au courant. « Ils ne savent pas. Ils posent des questions : “ou tu dormais ?” Je ne veux pas lui répondre parce que j’ai peur », confie la fillette, qui avoue craindre les moqueries. Elle est pourtant loin d’être la seule à avoir dormi dans ces locaux.
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Depuis plusieurs années, des parents et des instituteurs de l’établissement engagés au sein du collectif Jamais sans toit s’organisent pour héberger dans l’école des familles d’élèves. « Chaque début d’année, on a des enfants que l’on repère grâce à leur adresse, parce que c’est une adresse postale ou parce que les mamans en parlent aux enseignants qui nous alertent et après, on essaie de trouver des solutions. Très souvent, la solution, c’est d’occuper une école pour ces familles pour les mettre à l’abri. »
Sans cette solution, Mariam et ses parents vivraient à la rue. Déboutés du droit d’asile, ils ont dû quitter un foyer il y a neuf mois. Depuis, leurs appels quotidiens au 115, la plateforme d’hébergement d’urgence, restent vains. « Nous avons dû dormir dans notre voiture pendant près d’un mois, raconte le père. Mais Mariam n’arrivait pas à se reposer. Une voiture, c’est trop petit pour trois personnes. Elle était tout le temps nerveuse. Elle pleurait tous les jours. Alors que maintenant, nous avons au moins sept pièces, des matelas, nous pouvons dormir comme des humains. Elle est maintenant plus calme, plus facile. »
Une amélioration de son état qui se ressent en classe. Mariam progresse bien, elle qui s’était endormie sur un petit bureau d’écolier lors de la première rencontre entre ses parents et son instituteur.
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