Avoir moins de chances d’être retenu à un entretien d’embauche ou dans la recherche d’un logement en raison de la coupe ou de la texture de ses cheveux, c’est ce qui s’appelle de la discrimination capillaire. Le député de Guadeloupe Olivier Serva, du groupe Liot, tente de faire reconnaître ces discriminations encore méconnues. Dès ce mercredi 27 mars, cette proposition de loi sera en débat au sein de l’hémicycle et soumise au vote des parlementaires.
Le sujet peut faire sourire celles et ceux qui ne se sentent pas concernés. En France, six personnes sur dix n’ont pas les cheveux lisses. C’est le cas de Kenza. Cette influenceuse porte aujourd’hui avec fierté une coupe afro bouclée. Pourtant, ça n’a pas toujours été le cas.
« J’ai un bel afro bouclé. Auparavant, je l’ai beaucoup défrisé et lissé, donc par rapport à ma santé, je l’ai mis en danger. Et ensuite, je l’ai beaucoup dénaturé pour correspondre à des standards de beauté, puisque c’est ce qu’on me répétait, que mon cheveu était sale, négligé, qui n’était pas professionnel, que ça m’allait mieux quand il était lisse, puisque soi-disant plus soigné, plus doux, plus brillant, et mon apparence ne va pas justifier mes compétences », déplore Kenza.
En 2005, un steward d’une compagnie aérienne nationale est licencié par son employeur à cause de ses tresses. Cette affaire sera le point de départ du député Olivier Serva, l’initiateur de cette loi.
« Il s’agit de dire non à la discrimination capillaire, quelle que soit la longueur, la texture ou la couleur des cheveux. Voilà le sens de cet article. Ça concerne beaucoup les Afro-descendants, mais pas que, précise le député. Ensuite, il n’y a pas d’étude ethnique en France, mais aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, il y en a. Elles disent plusieurs choses. La première, c’est que vous avez deux femmes noires sur trois qui disent qu’elles doivent changer de coupe de cheveux pour aller postuler pour un entretien d’embauche. »
« On ne t’accepte pas pour ce que tu es »
Quand on est à la recherche d’un travail, l’apparence physique et les cheveux sont des facteurs importants qui peuvent influencer la décision d’un recruteur.
« Il y a certaines fois où j’ai eu des rendez-vous pour des stages étudiants et j’ai compris que ça gêne un petit peu, et qu’une coupe, on va dire plus carrée, sans tresses, avec un dégradé, les gens préféreraient ça », déclare Louis, 23 ans, étudiant.
« On me convoquait dans le bureau en disant : “On sait que tu tiens à tes cheveux.” Je réponds : “Ah bon, pas toi ?“, et on me demandait de les lisser, parce que ce n’était pas professionnel. Mes cheveux, même si demain, je les lisse, je passe sous la douche, ils refrisent. Donc, on était en train de me dire : “On ne t’accepte pas pour ce que tu es“ », témoigne Fanta, une ancienne policière victime de harcèlement.
Dans les motifs de discrimination, les cheveux sont souvent les grands oubliés. Rokhaya Diallo, journaliste : « Il y a vraiment une discrimination qui est implicite, où on ne va pas vous dire que le problème, c’est que vous êtes noir ou afro-descendant, mais on va vous dire : “Cette coiffure-là ne correspond pas à l’image que veut promouvoir notre entreprise.” Donc ça, c’est effectivement important d’en parler aujourd’hui. »
Le texte porté par le député Olivier Serva aimerait combler « un trou dans la raquette » dans l’arsenal législatif français contre les discriminations.
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