L’intelligence artificielle (IA) tourne de façon discrète depuis des années dans les iPhone, mais vient de faire une arrivée tonitruante lors de la WWDC d’Apple. Cette conférence événement permet aux développeurs de se rencontrer et aux utilisateurs de découvrir les dernières mises à jour logicielles et les futurs produits Apple. Déceptif ou disruptif ce virage IA ? RFI vous explique en compagnie d’un expert les enjeux de l’arrivée de l’IA dans les iPhone.
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Apple commence tout juste à négocier le virage technologique provoqué par l’IA, c’était attendu depuis longtemps et ça a été annoncé ce lundi lors de la conférence WWDC à Cupertino en Californie, au siège de l’entreprise. Avec Apple Intelligence*, la marque à la pomme présente un nouveau système d’optimisation des iPhone et des Mac, grâce à l’intelligence artificielle (IA) générative, le tout en partenariat avec OpenAI. « Nous sommes très heureux de collaborer avec Apple pour intégrer ChatGPT à leurs appareils plus tard cette année ! Je pense que vous allez vraiment apprécier » a posté sur X, le directeur général d’OpenAI, Sam Altman.
« Apple utilisait déjà l’IA »
Pourtant, l’intelligence artificielle (IA) était déjà présente dans les iPhone depuis plusieurs générations, explique Emmanuel Torregano, journaliste spécialisé et rédacteur en chef d’Electron libre : « La grosse différence, c’est que ce qu’Apple faisait très bien de façon discrète a été balayé d’un point de vue médiatique quand ChatGPT a été présenté au grand public par OpenAI ». Et d’ajouter : « Apple utilisait déjà l’IA : les fonctions prédictives sur le clavier, c’est de l’IA, tout le travail réalisé autour des photos, c’est de l’IA. Et la liste est longue… Apple a intégré assez vite l’IA, comme si c’était du calcul graphique, mais ça reste de l’IA. »
En 2017, en effet, Apple a introduit dans ses iPhone le processeur Neural Engine*, ce qui a permis d’accélérer les tâches d’IA et d’apprentissage automatique. Il est utilisé pour la reconnaissance faciale (Face ID), la détection d’objets dans les photos, la reconnaissance vocale (Siri) ou encore l’analyse de vidéos… Ce processeur d’applications de machine learning (ML) permet également d’améliorer les performances de l’apprentissage automatique et de l’apprentissage machine dans les applications tierces. Neural Engine contribue également à améliorer la sécurité et la confidentialité en permettant des traitements de données locaux (dans la machine) plutôt que sur des serveurs distants (comme c’est le cas lorsque l’on va solliciter les différents modèles de langage en IA).
Une technologie et une architecture distinctes de celle d’OpenAI
C’est tout l’enjeu longuement expliqué durant la conférence d’une valeur fondamentale chez Apple : que l’IA tourne dans le smartphone et que les données ne partent pas ailleurs. « What Happens on your iPhone, Stays on your iPhone » (« Ce qui se passe dans votre smartphone reste dans votre smartphone », en anglais), fut un slogan d’Apple lors du CES de 2019. Une des raisons qui font que ces développements ne fonctionneront qu’avec des produits dernière génération, c’est à dire équipés de puces capables de faire ce type de calculs en IA (minimum Iphone 15 et Mac équipés de la puce M1). Car si Apple Intelligence utilisera ChatGPT en partenariat pour certaines demandes, de façon transparente pour l’utilisateur, sa technologie et son architecture sont distinctes de celle d’OpenAI.
Les responsables du groupe qui se sont succédé lors de la présentation ont insisté, à plusieurs reprises, sur la protection des données personnelles. Ainsi, Craig Federighi, vice-président chargé de la conception logicielle, a mis en avant le concept de « cloud privé », grâce auquel un utilisateur peut bénéficier de la puissance de calcul de serveurs à distance pour une demande, sans que les données soient stockées ou utilisées par d’autres.
« Ils infusent l’IA dans l’IOS 18, petit à petit »
La volonté d’Apple lors de cette conférence WWDC est de reprendre un leadership en IA qui semble lui échapper, mais ce sera à son rythme et en restant maître de son jeu. Selon Emmanuel Torregano : « Le neural engine est utilisé depuis longtemps mais Apple ne fera quelque chose dans l’IA que si c’est utile à son client. C’est pour eux la base même de leur travail. Ils veulent que ça soit utile et ils ne peuvent le faire qu’à partir du moment où ils ont trouvé à quoi l’IA pouvait bien servir. Ils infusent l’IA dans l’IOS 18, petit à petit, et ils sont en train de reconstruire leur OS sans trop y toucher. »
Une infusion lente qui fait douter certains fans de la marque à la pomme qui ne reconnaissent plus une entreprise habituellement disruptive (plus susceptible de briser les habitudes). L’action d’Apple a d’ailleurs perdu quelque peu de sa valeur et le partenariat avec OpenAI a provoqué la colère d’Elon Musk qui menace d’interdire l’iPhone dans ses sociétés. Emmanuel Torregano sourit : « Musk a attaqué Apple en disant “Comment pouvez-vous faire un accord avec ChatGPT ?” Il n’est pas content parce qu’Apple a signé avec OpenAI (son ancienne entreprise) et pas avec Grok, son nouveau modèle d’IA ? C’est pourtant le type d’accord qu’Apple a réalisé avec Google, intégré depuis dans tous les appareils iOS. Et je pense qu’ils feront la même chose avec d’autres si nécessaire. Pour Apple, l’IA est un truc à part, c’est une fonctionnalité, mais ce n’est pas un univers en soi. L’univers, ça reste MacOS, l’Operating System selon Apple, et c’est lui qu’ils font tremper dans l’IA pour s’ouvrir à de nouveaux services. »
Alors, décevante ou concluante cette « lente » arrivée de l’IA chez Apple ? Le fabricant reste-t-il encore disruptif ? « Je suis plutôt dans la catégorie de ceux qui pensent qu’il aurait fallu que ça soit disruptif. Après, je ne peux pas leur enlever le fait que ce qu’ils ont fait, c’est très bien et que dans leur genre, ce sont les meilleurs. Ce sont eux qui font le meilleur boulot à chaque fois pour adapter les nouvelles technologies. Ce sont clairement les meilleurs mais ils ne sont plus dans le disruptif depuis longtemps et il y a un moment où il va falloir le faire parce qu’Apple c’est une boîte qui, tous les 20 ou 30 ans, se réinvente. Elle a révolutionné régulièrement le domaine et donc elle se doit d’inventer quelque chose d’autre. » En jouant sur l’abréviation AI en anglais d’Artificial Intelligence, la marque à la pomme avec Apple Intelligence s’approprie une technologie, voire en fait sa nouvelle marque de fabrique, mais gagnera-t-elle son pari pour autant ?
Le Neural Engine est un type d’unité de traitement de neurones (NPU) qui vise à accélérer les opérations de réseaux de neurones, notamment les convolutions et les produits matriciels, ce qui le rend plus rapide et plus efficace que les processeurs centraux (CPU) et les unités de traitement graphique (GPU) pour ces tâches. Cela signifie une accélération des opérations de machine learning ML. Le Neural Engine est conçu pour améliorer les performances des modèles de ML, notamment pour les tâches de vision par ordinateur, d’apprentissage automatique et de traitement du langage naturel. Le Neural Engine est plus efficace énergétiquement que les CPU et les GPU pour les opérations de ML, et consomme moins d’énergie pour les mêmes tâches.
Apple Intelligence, la nouvelle plateforme d’intelligence artificielle d’Apple, a comme fonctionnalités l’intégration de ChatGPT que les utilisateurs pourront utiliser également en liant leur compte. Apple Intelligence ajoutera considérablement aux fonctionnalités de Siri, ce qui signifie que l’assistant virtuel sera plus puissant et plus efficace.
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