Le coucou, un parasite en évolution permanente

Share

Cruel, fourbe, paresseux, voire immoral. Le coucou n’a pas franchement bonne réputation. Pondre ses œufs dans le nid des autres, les laisser nourrir les oisillons au détriment de leur propre progéniture, souvent poussée hors du nid : difficile de rester tout à fait insensible à ses turpitudes. Pourtant, étudier de plus près le génie qu’impose un tel « parasitisme de couvée » fait changer de perspective. Pour parvenir à ses fins, le coucou doit pondre en toute discrétion des œufs presque identiques à ceux de son hôte et tromper sa vigilance. Il y parvient de façon magistrale. Il peut imiter le cri d’un prédateur pour faire fuir temporairement sa cible. Pondre à une vitesse record. Reproduire la forme, la couleur, les motifs mêmes des coquilles, comme un faussaire avec une toile de maître.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Le coucou, imitateur perfide

Un exploit d’autant plus remarquable qu’en face, le propriétaire légitime du nid n’a aucun intérêt à fournir ainsi gîte et couvert. L’évolution va donc le doter de « contre-mesures » lui permettant de détecter l’intrus. Dans un article paru lundi 30 mai dans la revue Science, une équipe internationale vient de montrer comment cette « course aux armements », comme l’appellent les biologistes, conduit les coucous à évoluer plus rapidement que les autres oiseaux. Mieux, les chercheurs ont établi que ce parasitisme dopait la spéciation, autrement dit l’apparition de nouvelles espèces.

Cette question taraude les biologistes depuis toujours. Comment sont nées ces millions d’espèces qui peuplent notre planète ? Darwin y a en partie répondu. Pour faire très simple : la nécessité d’échapper à un prédateur, d’atteindre une proie ou encore d’améliorer son succès reproducteur, conduit, dans chaque espèce, à la sélection de certaines mutations favorables, parmi toutes celles que le hasard produit à chaque génération. Pour peu qu’une population se trouve alors scindée en deux par un événement extérieur, notamment l’apparition d’un obstacle environnemental (rivière, bras de mer, disparition de forêt…), les deux sous-groupes vont poursuivre le processus chacun de leur côté et irrémédiablement s’éloigner. Mais il arrive que deux espèces apparaissent sur un même territoire. Le parasitisme aurait-il un rôle dans l’histoire ?

Imitation des œufs et des poussins

Pour le comprendre, les chercheurs australiens et britanniques ont commencé par suivre les oiseaux du genre Chrysococcyx, ceux que la langue anglaise, dans son goût des noms imagés, nomme les coucous de bronze. « Les joyaux de la couronne dans le monde des coucous, insiste Naomi Langmore, de l’université nationale australienne, à Sydney. Les plus petits et les plus beaux, avec leur plumage vert iridescent. » Des maîtres du parasitisme, aussi. La professeure d’écologie évolutive les observait déjà depuis de nombreuses années quand elle s’est aperçue que l’oiseau, non content de copier les œufs de son hôte, imitait aussi ses poussins. « La couleur de la peau, la bouche, le nombre de plumes de duvet, les cris… chaque coucou les reproduit avec une extraordinaire précision », poursuit-elle.

Il vous reste 34.45% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source du contenu: www.lemonde.fr

Dernières nouvelles

Dernières nouvelles